Hakkımda

Fotoğrafım
Şişli / İstanbul, (0533 2490843) vildan_ornadis@hotmail.com, Türkiye
Chers abonnés et visiteurs du blog;Tout au long de ma vie scolaire,j’ai reçu un enseignement français.Après avoir terminé le collège français “Sainte-Pulchèrie” j’ai continué à ma vie lycéenne au “Lycée Français Saint-Michel”.J’ai reçu mon diplôme de fin d’études secondaires 3 ans plus tard. À la suite du lycée,j’ai étudié la philologie et la littérature française à “L’Université d’Istanbul, dans “La Faculté des Lettres”;simultanément j’ai étudié la formation pédagogique à L’Université d’Istanbul,dans“La Faculté d’Éducation”(“Formation à L’Enseignement”).Après 4 ans d’études de double licence je suis diplômée en tant que philologue,aussi professeur de français.Toutes les formations que j’ai acquises m’ont perfectionnée dans les domaines tels que la langue, la littérature et la culture française ainsi que la formation pédagogique. Depuis 11 ans, je partage mes connaissances avec ceux qui veulent apprendre la langue,la culture et la civilisation française. J’enseigne les gens de tout âge et de tout niveau depuis les élèves des écoles françaises,jusqu’aux étudiants de diverses universités sans oublier les hommes ou femmes d’affaires ni les amateurs de la francophonie

Présentation

Sevgili Blog Takipçileri;
Tüm eğitim hayatımı fransızca gördüm. İstanbul'da bulunan‘’Özel Sainte-Pulchérie Fransız Kız Ortaokulu’’nu bitirdikten sonra liseyi İstanbul'da bulunan ''Özel Saint-Michel Fransız Lisesi’’nde okudum. Ardından ‘’İstanbul Üniversitesi Edebiyat Fakültesi Batı Dilleri ve Edebiyatları Bölümü‘’ içinde yer alan ‘’Fransız Dili ve Edebiyatı Anabilim Dalı’’nda dört yıllık lisans eğitimimi tamamladım.Bu süre içerisinde ‘’İstanbul Üniversitesi Eğitim Fakültesinde Pedagojik Formasyon’’ alanında eğitim görüp çift anadal diploması aldım. Böylece hem filolog (Dilbilimci) hem de öğretmen olarak mezun oldum. Aldığım bütün bu eğitimler bana hem Fransız Dili, hem Fransız Edebiyatı hem de Pedagoji alanlarında büyük bir yetkinlik sağladı. Onbir yıldır teorik olarak edindiğim tüm bilgileri, pratikte bu dili ve kültürü öğrenmek isteyen her yaştan her gruptan kişilere aktarıyorum. İstanbulda bulunan fransız kolejlerinde eğitim gören öğrenciler başta olmak üzere üniversite öğrencileri, iş adamları, fransız kültürüne meraklı olup kendini geliştirmek isteyen her yaştan her meslek grubundan kişiler meslek hayatım süresince öğrencim olmuştur ve olmaya devam edecektir.

EĞİTMENLİK YAPTIĞIM ALANLAR ►

MES DOMAINES D'ENSEIGNEMENT-EĞİTMENLİK YAPTIĞIM ALANLAR

Grammaire – Littérature – Biologie ( Pour les élèves des écoles françaises - Fransız kolejlerinde eğitim gören öğrenciler için )

Préparation au concours organisé par L'Université de Galatasaray - Galatasaray Üniversitesi iç sınavına hazırlık

Préparation au concours de langue étrangère - YDS (Üniversite Yabancı Dil sınavı) ye hazırlık

Toutes sortes de conseils d'orientation scolaire en France (licence, master) - Fransa’da yüksek öğrenim (lisans , yüksek lisans) görmek isteyen öğrencilere, üniversite seçimlerinden motivasyon mektubu yazımına kadar her türlü alanda eğitim danışmanlığı

Etudes spéciales (privées ou en groupe) pour les adultes -Yetişkinler için kişiye özel birebir ve grup çalışmaları

Cours de la langue Turque (grammaire - conversation) pour les étrangers - Yabancılara türkçe (dil bilgisi ve konuşma) dersleri

BLOGU BİRLİKTE GELİŞTİRELİM (Développons ensemble le contenu du blog)

Le contenu du blog est bilingue. Le blog sera développé grâce à la contribution des abonnés. On présentera les oeuvres des écrivains français, on partagera des résumés ainsi que des analyses et des commentaires sur le blog. Pour mieux concevoir la littérature contemporaine, on va traiter les nouveaux auteurs et courants, on va discuter sur les extraits de leurs oeuvres pour autant la littérature classique et antique. On va honorer les célèbres auteurs classiques en parlant de leurs oeuvres et des courants qu'ils ont initiés à la très chère littérature française. Parfois, on parlera d'une époque soit artistique, soit historique; ou bien on va donner des informations générales ou spécifiques sur la France, la culture française etc...
Pour tout cela il est nécessaire que nos abonnés soient en contact et en collaboration avec nous.

İçerik hem türkçe hem fransızcadır. Siz takipçilerin katkılarıyla gelişecektir blog yazıları. Fransız yazarların eserlerinin tanıtımı kimilerinin özetleri, farklı dönemlerden yazarlar ve eserleri hakkında analiz ve yorumlarla çeşitlendireceğiz blogumuzu. Klasik edebiyata olduğu kadar çağdaş metinlere de önem vereceğiz yeni yazarları işleyeceğiz eserlerinden alıntılar yapacağız. Kimi zaman bir dönemi ele alacağız, bazen de Fransa ile ilgili genel bilgiler, tanıtımlar yapacağız. Katkılarınızı bekliyoruz...

Merci Bien - Teşekkürler

FRANSIZCA ÖĞRENMEK İSTER MİSİNİZ ?

FRANSIZCA ÖĞRENMEK İSTER MİSİNİZ ?

Fransızca öğrenmeyi hiç düşündünüz mü ?

Düşünüyorsanız....

Fransızcaya adım atmak isteyen sizlere Başlangıç seviyesinden İleri seviyelere kadar her aşamada yardımcı olabilecek bu site sayesinde Fransızcanızı geliştirebilirsiniz. Dünyada 450 milyon kişi Fransızca konuşuyor yani ''FRANCOPHONE'' .

Siz de neden bir ''FRANCOPHONE'' olmayasınız ? Bu sayede dünya edebiyatına mal olmuş en önemli sanatçıların eserlerini anadilinden okuma şansınız olur. Siz de Montaigne'nin "Denemeler"ini,Molière'den "Cimri"yi,LaFontaine'den masalları, Voltaire,Rousseau ve Montesquieu'nin felsefelerini, Honoré de Balzac,Victor Hugo,Stendhal, Zola ve Alexandre Dumas'nın romanlarını; 20.yüzyıla şekil vermiş aydınlar olan Jean-Paul Sartre ve Albert Camus'nun eserlerini orijinal dilinden okuyup anlama ve analiz etme ayrıcalığına sahip olabilirsiniz. Fransızca öğrenmek sadece bir dil öğrenmekten ibaret değildir.İnsanın hayata bakışını değiştiren,vizyonunu geliştiren,önünde bambaşka ufukların açıkmasını sağlayan; gastronomisiyle,eğlence anlayışıyla,farklı sanat dallarıyla ve modasıyla bütün halinde bir yaşam tarzıdır.Bu yaşam tarzını edinmenin birinci koşulu diline hâkim olmaktan geçer.Bu anlamda blogumuzu diğerlerinden ayıran en temel fark sadece dile odaklı olmayışımızdır."Dil" burada sadece bir araçtır, amacımız fransız kültürünü etraflıca ele almak ve yaygınlığını arttırmaktır.

Böylece,bir gün üyesi olmayı hedeflediğimiz Avrupa Birliğine katıldığımız zaman farklı kültürlere uyum sağlamakta zorluk çekmeyeceğiz.

31 Ocak 2011 Pazartesi


MADAME DE LA FAYETTE (1634 - 1693)

Le nom de madame de La Fayette reste indissociablement lié à son oeuvre maitresse: La princesse de Clèves. Considérée par certains comme le premier roman de la littérature française, cette oeuvre reste sans conteste le chef-d'oeuvre du roman précieux.

Marie-Madelaine de La Vergne est née à Paris. Elle fréquente la meilleure société et se fait remarquer par sa beauté et son intelligence. Scarron la décrit ainsi: "Toute lumineuse et toute précieuse". En 1655, elle épouse le comte de La Fayette, beaucoup plus âgé qu'elle, et qui est fort occupé par l'administration de ses domaines en Auvergne. Au bout de trois ans, elle revient se fixer définitivement à Paris. Bien accueillie à la cour, elle devient l'une des intimes d'Henriette d'Angleterre, belle-soeur du roi. Chez elle, elle reçoit une société choisie: madame de Sévigné, le cardinal de Retz et surtout La Rochefoucauld, qui devient le plus fidèle de ses amis. Conseillée par des hommes de lettres, elle se met à écrire, sans jamais pourtant signer ses oeuvres. Mais peu à peu, la mort de ses amis l'isole du monde; elle mène une vie retirée et de plus en plus austère, d'où l'influence janséniste n'est pas absente.

SES OEUVRES

La Princesse de Montpensier
Cette nouvelle raconte l'histoire d'une femme qui lutte contre l'amour défendu. Sans aller jusqu'à tromper son mari, elle découvre pourtant qu'elle a cessé d'être pure dans son coeur. Le style est sobre et les sentiments y sont dépeints avec beaucoup de vérité.

Zaïde
Publié sous la signature d'un homme, c'est un roman baroque en deux parties, parues successivement. Il prolonge le courant du roman héroïque, auquel il emprunte le décor espagnol.

La Princesse de Clèves
C'est encore un livre qui parait sans la mantion du nom de madame de La Fayette. Une vraie campagne publicitaire, orchestrée par les salons, assure cependant le succès de l'ouvrage.

Présentée à la cour d'Henri II, mademoiselle de Chartres éblouit tout le monde par sa beauté. Le jeune prince de Clèves en tombe amoureux et obtient sa main, bien que la jeune fille n'éprouve guère plus que de l'estime pour lui. A l'occasion d'un bal, elle fait la connaissance du duc de Nemours. C'est le début d'une grande passion, si forte qu'elle l'avoue à son mari. Miné par la jalousie, monsieur de Clèves meurt de chagrin. Le duc de Nemours se fait de plus en plus pressant. La princesse de Clèves lui avoue son amour, mais lui déclare que son devoir lui interdit de l'épouser. Elle se retire dans une maison religieuse.

L'action du roman se déroule sous les règnes d'Henri II et de François II au XVIème siècle. Madame de La Fayette s'est documentée sérieusement sur l'époque et les personnages qu'elle fait revivre: Henri II, Cathérine de Médicis, Marie Stuart, et... La trame historique est une contrainte romanesque à laquelle sait se plier l'auteur: ainsi, l'éqtiquette interdit à madame de Clèves de s'absenter longuement de la cour. Mais sur ce fond historique se superpose l'image d'une autre cour, celle de Louis XIV, et tout ce que madame de La Fayette a pu observer personnellement de la vie des princes.

Les personnages de madame de La Fayette mettent l'honneur au-dessus de toutes choses. Torturés par la passion amoureuse, ils n'osent jamais s'abandonner. L'héroisme de leur sacrifice rappelle la tragédie cornélienne. Cette morale n'a pas d'assise religieuse, elle repose sur les seules conventions sociales, et lorsque la princesse de Clèves se retire dans un couvent, c'est plus pour fuir le monde qui l'a tant fait souffrir que pour se retourner vers Dieu.

Bien que brève, cette oeuvre est construite selon la technique du roman précieux: quatre épisodes secondaires s'intercalent dans l'intrigue principale. Des procédés peu classiques, parce que peu vraisemblables, sont utilisés pour mener le développement de l'histoire: conversation surprise au bon moment, lettre égarée, portrait dérobé, etc. Le langage est typiquement précieux avec une abondance d'adjectifs en -able et de superlatifs.

L'aveu de la princesse
 Le code de l'amour relève aussi de la préciosité. Le duc de Nemours est un homme délicat et galant. Le vocabulaire amoureux est celui de la carte du Tendre de mademoiselle de Scudéry: "estime", "reconnaissance", "inclination". Le tragique nait de "l'inclination" du prince de Clèves pour une jeune femme qui n'a pour lui que de "l'estime" et de la "reconnaissance", alors qu'entre elle et le duc de Nemours existe une forte "inclination" réciproque.

Au millieu des interminables romans du XVIIème siècle -L'Astrée, Le Grand Cyrus, Clélie- , La princesse de Clèves, oeuvre très brève, est le seul à retenir encore notre attention. Cette brièveté, légère et précise comme une esquisse fait la modernité du livre qui reste cependant typique du genre précieux.

 EXTRAITS DE
 "LA PRINCESSE DE CLEVES"

La Rencontre au Bal
Cette scène fait pendant à la précédente: nouveau coup de foudre mais cette fois sera partagé. Ces deux êtres sont faits l'un pour l'autre et semblent prédestinés à s'aimer. Mais le malheur veut que Mme de Clèves ne soit plus libre. On notera dans ce texte la finesse de l'analyse psychologique.

Mme de Clèves avait ouïe parler de ce prince à tout le monde, comme de ce qu'il y avait de mieux fait et de plus agréable à la cour; et surtout Mme la Dauphine le lui avait dépeint d'une sorte, et lui en avait parlé tant de fois, qu'elle lui avait donné de la curiosité et même de l'impatience de le voir. Elle passa tout le jour des fiançailles chez elle à se parer, pour se retrouver au bal et au festin royal qui se faisaient au Louvre. Lorsqu'elle arriva l'on admira sa beauté et sa parure; le bal commença; et comme elle dansait avec M. de Guise, il se fit un assez grand bruit vers la porte de la salle, comme de quelq'un qui entrait et à qui on faisait place. Mme de Clèves acheva de danser et pendant qu'elle cherchait des yeux quelqu'un qu'elle avait dessein de prendre, le roi lui cria de prendre celui qui arrivait. Elle se tourna et vit par-dessus quelques sièges pour arriver où l'on dansait. Ce prince était fait d'une sorte qu'il était difficile de n'être pas surpris de le voir quand on augmentait encore l'air brillant qui était dans sa personne; mais il était aussi difficile de voir Mme de Clèves pour la première fois sans avoir un grand étonnement.


M. de Nemours fut tellement surpris de sa beauté que, lorsqu'il fut proche d'elle et qu'elle lui fit la révérence, il ne put s'empêcher de donner des marques de son admiration. Quand ils commencèrent à danser, il s'éleva dans la salle un murmure de louanges. Le roi et les reines se souvinrent qu'ils ne s'étaient jamais vus et trouvèrent quelque chose de singulier de les voir danser ensemble sans se connaitre. Ils les appelèrent quand ils eurent fini, sans leur donner le loisir de parler à personne, et leur demandèrent s'ils n'avaient pas bien envie de savoir qui ils étaient et s'ils ne s'en doutaient point. "Pour moi, madame, dit M. de Nemours, je n'ai pas d'incertitude; mais comme Mme. de Clèves n'a pas les mêmes raisons pour deviner qui je suis que celles que j'ai pour la reconnaitre, je voudrais bien que Votre Majesté eût la bonté de lui apprendre mon nom. -Je crois, dit Mme la Dauphine, qu'elle le sait aussi bien que vous savez le sien-. Je vous assure, madame, reprit Mme de Clèves, qui paraissait un peu embarassée, que je ne devine pas si bien que vous pensez. -Vous devinez fort bien, répondit Mme la Dauphine; et il y a même quelque chose d'obligeant pour M. de Nemours, à ne pas vouloir avouer que vous le connaissez sans jamais l'avoir vu". La reine les interrompit pour faire continuer le bal: M. de Nemours prit la reine Dauphine. Cette princesse était d'une parfaite beauté et avait paru telle aux yeux de M. de Nemours, avant qu'il allât en Flandre; mais, de tout le soir, il ne put admirer que Mme de Clèves.

L'AVEU
Craignant que l'attitude de son héroine ne parut invraisemblable, l'auteur nous a longuement préparés à cette scène capitale. Tout concourt à rendre cet aveu paisible: la sincérité innée de la princesse de Clèves  et le prix que son mari attache à cette vertu, ainsi que les dernières recommandations que sa mère lui a adressées avant de mourir. "Il n'y a que vous de femme au monde, lui dit un jour la dauphine, qui fasse confidence à son mari de toutes les choses qu'elle sait". Elle a déjà envisagé à plusieurs reprises de tout dire à son mari, mais sans pouvoir s'y résoudre encore. Maintenant cet aveu si courageux, si difficile est devenu inévitable si elle ne veut pas succomber, car son époux la presse de revenir à la cour, qu'elle a quittée pour ne plus rencontrer Nemours. Pourtant dans le débat littéraire pour ou contre l'aveu qui suivit la publication du roman et passionna l'opinion, la majorité des lecteurs condamna l'aveu, en le jugeant "extravagant".
La scène se passe à Coulommiers, dans un pavillon. Par un artifice qui nous gêne aujourd'hui, il se trouve que Nemours assiste, dissimulé, à cet entretien confidentiel.

Ne me contraignez point, lui dit-elle, à vous avouer une chose que je n'ai pas la force de vous avouer, quoique j'en ai eu plusieurs fois le dessein. Songez seulement que la prudence ne veut pas qu'une femme de mon âge, et maitresse de sa conduite, demeure exposée au millieu de la cour. -Que me faites-vous envisager, madame? s'écria M. de Clève! je n'oserais vous le dire de peur de vous offenser". Mme de Clèves ne répondit point, et son silence achevant de confirmer son mari dans ce qu'il avait pensé: "Vous ne me dites rien, reprit-il, et c'est me dire que je ne me trompe pas. - Eh bien, monsieur lui répondit-elle en se jetant à ses genoux, je vais vous faire un aveu que l'on n'a jamais fait à un mari; mais l'innocence de ma conduite et de mes intentions m'en donne la force. Il est vrai que j'ai des raisons pour m'éloigner de la cour, et que je veux éviter les périls où se trouvent quelquefois les personnes de mon âge. Je n'ai jamais donné nulle marque de faiblesse et je ne craindrais pas d'en laisser paraitre, si vous me laissiez la liberté de me retirer de la cour, ou si j'avais encore Mme de Chartres pour aider à me conduire. Quelque dangereux que soit le parti que je prends, je le prends avec joie pour me conserver digne d'être à vous. Je vous demande mille pardons, si j'ai des sentiments qui vous déplaisent: du moins je ne vous déplairai jamais par mes actions. Songez que, pour faire ce que je fais, il faut avoir plus d'amitié et plus d'estime pour un mari que l'on n'en a jamais eu: conduisez-moi, ayez pitié de moi, et aimez-moi encore, si vous pouvez.

M. de Clèves était demeuré, pendant tout ce discours, la tête appuyée sur ses mains, hors de lui-même, et il n'avait pas songé à faire relever sa femme. Quand elle eut cessé de parler, qu'il la vit à ses genoux, le visage couvert de larmes, et d'une beauté si admirable, il pensa mourir de douleur, et l'embrassant en la relevant: "Ayez pitié de moi vous-même, madame, lui dit-il, j'en suis digne, et pardonnez si dans les premiers moments d'une affliction aussi violente qu'est la mienne, je ne réponds pas comme je dois à un procédé comme le vôtre. Vous me paraissez plus digne d'estime et d'admiration que tout ce qu'il y a  jamais eu de femmes au monde; mais aussi je me trouve le plus malheureux homme qui ait jamais existé. Vous m'avez donné de la passion dès le premier moment que je vous ai vue; vos rigueurs et votre possession n'ont pu éteindre, elle dure encore: je n'ai jamais pu vous donner de l'amour, et je vois que vous craignez d'en avoir pour un autre. Et qui est-il, madame, cet homme heureux qui vous donne cette crainte? Depuis quand vous plait-il? Qu'a-t-il fait pour vous plaire? Quel chemin a-t-il trouvé pour aller à votre coeur? Je m'étais consolé en quelque sorte de ne l'avoir pas touché, par la pensée qu'il était incapable de l'être. Cependant un autre fait ce que je n'ai pu faire; j'ai tout ensemble la jalousie d'un mari après un procédé comme le vôtre. Il est trop noble pour ne pas me donner une sûreté; il me console même comme votre amant. La confiance et la sincérité que vous avez pour moi sont d'un prix infini: vous m'estimez assez pour croire que je n'abuserai pas de cet aveu. Vous avez raison, madame, je n'en abuserai pas et je ne vous en aimerai pas moins. Vous me rendez malheureux par la plus grande marque de fidélité que jamais une femme ait donnée à son mari; mais madame, achevez, et apprenez-moi qui est celui que vous voulez éviter. -Je vous supplie de ne me le point demander, répondit-elle; je suis résolue de ne pas vous le dire, et je ne crois que la prudence ne veut pas que je vous le nomme. -Ne craignez point, madame, reprit M. de Clèves; je connais trop le monde pour ignorer que la considération d'un mari n'empêche pas que l'on ne soit amoureux de sa femme. On doit hair ceux qui le sont, et non pas s'en plaindre; et, encore une fois, madame, je vous conjure de m'apprendre ce que j'ai envie de savoir. -Vous m'en presseriez inutilement, répliqua-t-elle; j'ai de la force pour taire ce que je ne crois pas devoir dire. L'aveu que je vous ai fait n'a pas été par faiblesse, et il faut plus de courage pour avouer cette vérité qui pour entreprendre de la cacher.

Madame de La Fayette

29 Ocak 2011 Cumartesi


LES DEUX VILLAGES

Depuis longtemps, de part et d'autre d'un large fleuve d'Afrique, deux villages se faisaient face. Ils étaient à peu près de même importance mais les conditions du fleuve à cet-endroit-là, rendaient la tarversée très difficile: courant et remous violents présence de crocodiles, de serpents vénimeux et même (disait-on de mauvais esprits)

Très rare étaient les audacieux qui, à la nage ou en barque, avaient tenté de passer d'un village à l'autre. Et aucun, jamais, n'était revenu, ce qui rendait les tentatives de plus en plus rares. Les deux villages qui s'appelaient OGADAOU et OUADAGO, se contentaient de se regarder à distance, de voir les fumées qui s'élevaient de telle ou telle case, le vol des oiseaux, les nuages. On apercevait parfois une ou deux silouhettes, là-bas sur l'autre rive, des barques longeants le bord du fleuve, quelque feu la nuit et les rapports s'arrêtaient là.

Un jeune habitant de OGADAOU, qui s'appelait Bakari, se sentait fasciné depuis son plus jeune âge par la présence de cet autre village, qui constituait à vrai dire son seul horizon, et qu'il rêvait de visiter un jour.

Quand il eut dix-huit ou vingt ans, il décida de tenter à son tour l'aventure de la traversée. Il s'y prépara soigneusement, creusant une pirogue la nuit, prévoyant une pagaie de rechange, un large et long couteau en cas d'attaque d'animaux aquatiques, ainsi que des amulettes contre les esprits. Il s'entraina de son mieux le long de la rive où il habitait s'aventurant même dans des remous dangereux, et il acquit, dans ce domaine, une véritable dextérité.

Quand il se sentit prêt, un matin, à l'aube, il quitta sans bruit la maison familiale, ses parents, sa jeune femme, le bébé qui venait de naitre - et s'élança sur le fleuve. Il avait gardé le secret sur sa tentative. Une force irrésistible, qu'il ne pouvait pas définir, l'attirait de l'autre côté du fleuve.

A sa surprise, la traversée fut plutôt calme. Les rapides et les courants paraissaient moins tumultueux et effrayants que lorsqu'on les observait de la rive. C'est à peine si Bakari sentit quelques secousses, qu'il sut dominer sans trop de peine. Il aperçut aussi quelques hippopotames tranquilles et des crocodiles qui laissèrent passer la pirogue dans une totale indifférence. Quant aux esprits, aucune trace.

Il mit pied à terre de l'autre côté, tira sa pirogue sur le sable et marcha jusqu'au village. Il se trouvait sur un territoire familier, très familier même: la même végétation, bien sûr, mais aussi les mêmes alignements de cases, les mêmes arbres, la même terre, les mêmes filets de pêche séchant au soleil du matin.

Des villageois commençaient à sortir, à prendre leurs utiles pour aller aux chmaps, tandis que les femmes secouaient les nattes devant les portes. Bakari, en s'avançant crut reconnaitre certains des habitants - ses voisins. Il reconnut aussi les cases, un tronc d'arbre abbatu, un chien à la patte cassée.

Surpris, il se retrourna pour regarder de l'autre côté du fleuve. S'était-il trompé? Avait-il cru traverser le fleuve, et les courants l'avaient-ils rejeté sur la rive même qu'il venait de quitter? Il s'avança un peu plus loin. Un habitant du village, le salua au passage en l'appelant par son nom. Bakari sut qu'il le connaissait, et même depuis longtemps. Cet homme aux cheveux gris était un ami de son père.

De plus en plus étonné, se sentant parfaitement à l'aise dans ces ruelles où il marchait pour la première fois, Bakari se trouva soudainement devant sa propre maison, qu'il venait de quitter une heure plus tôt. Il hésita à entrer, quand il vit sa propre mère sortir, un court balai à la main. En achevant de nettoyer son devant de porte, elle salua son fils en l'appelant par son nom et en souriant. Elle lui demanda d'où il venait. Il ne répondit que par un geste vague, en montrant le fleuve. Il entra dans la case, d'où jaillissaient les gémissements d'un bébé. Il trouva sa jeune femme qui s'apprêtait à donner le sein, et qui ne parut nullement surprise de voir son mari à cet endroit-là, à cette heure-là. Un sentiment proche de la tranquillité l'envahissait, effaçant les questions qui pouvaient le harceler, le gêner. Ses paupières s'appesantissaient. Sa femme lui demanda s'il avait soif. Il accepta un verre d'eau. Puis il s'endormit.

Bakari est resté dans ce village, celui qui s'appelle OUADAGO. Il a reprit son travail de paysan dans des champs dont il connait tous les secrets. Il a retrouvé son chien, ses utiles, sa barque - avec laquelle il va pêcher de temps en temps le long de la rive. Il vieillit. Sa femme est de nouveau enceinte. Par moments, il s'arrête et se tient immobile au bord du fleuve, les yeux longument fixés sur l'autre village là-bas. Il songe de plus en plus à y revenir, mais le fleuve lui parait terriblement agité et plein de bêtes dangereuses.

Sans doute a-t-il renoné à le traverser une nouvelle fois mais ce n'est pas sûr.

28 Ocak 2011 Cuma


MADAME DE SEVIGNE (1626 - 1696)

Madame de Sévigné n'a écrit ni tragédie ni roman ni poésie, mais elle a excellé dans l'art épistolaire. Elle a écrit plus de mille lettres à des personnages importants de l'époque et surtout à sa fille. Cet ensemble varié et spirituel constitue la vivante chronique de tout un quart de siècle.

Marie de Rabutin-Chantal est née à Paris. Orpheline de bonne heure, elle est élevée par un oncle qui lui fait donner une éducation soignée -elle apprend l'italien, l'espagnol, le latin-. Mariée à un jeune seigneur en 1644, elle devient marquise de Sévigné. Elle fréquente les salons, où elle brille par son charme et son esprit. Elle engage une correspondance avec des personnalités de l'époque: madame de La Fayette, le cardinal de Retz. Ses lettres sont déjà fort appréciées. Elle a 26 ans lorsque son mari est tué en duel. Par la suite, elle s'occupe beaucoup de ses enfants et surtout de sa fille. Lorsque celle-ci se marie en 1671 et suit son époux à Grignan, dans le Midi de la France, elle lui écrit de longues lettres, au moins deux par semaine, depuis Paris, mais aussi de Bretagne où elle possède un château. Lorsque madame de Sévigné meurt en 1696, elle a écrit près de 1200 lettres, réparties sur une trentaine d'années. Certaines ont été pendues, beaucoup d'autres n'ont été publiées qu'au cours du  XVIIIème et du XIXème siècle.

Dans cette correspondance, nous voyons vivre et évoluer pendant trente ans une personnalité, un peu comme dans les Essais de Montaigne, mais les préoccupations et le ton sont différents. Elle apparait spirituelle, enjouée; elle a tendance à voir les choses sous leur côté agréable. Sa tendresse pour sa fille, la force de ses amitiés nous sont livrées sans fard.

Elle a été marquée par le courant précieux de l'Hôtel de Rambouillet, sans en prendre les défauts. Elle garde l'imagination vive et une gaieté naturelle. Elle nous dit ses goûts, ses lectures, ses préférences. Elle admire mademoiselle de Scudéry et Corneille; elle se trompe parfois, comme en témoigne le peu d'intérêt qu'elle accorde à Racine: "Ce n'est pas pour les siècles à venir". Sans être austère, elle est attirée par le jansénisme et Pascal. Chose rare à l'époque classique, elle sait nous dire aussi son émerveillement pour la nature et la beauté des saisons.

Sa situation mondaine met madame de Sévigné en mesure d'être bien renseignée sur tout, et elle se fait un plaisir de renseigner à son tour ses correspondants. Elle raconte les événements qui agitent la cour et la capitale: procès du surintendant Fouquet, mort de Turenne, exécution de La Brinvilliers, etc. De façon plus vivante que dans des mémoires, elle nous donne la chronique du règne de Louis XIV, avec, semaine par semaine, tous les commérages et les faits divers. Pendant ses séjours en province, son écriture est proche de celle du reportage: elle raconte comment on  voyage, comment les paysans font les foins, la thérapeutique des eaux à Vichy. Elle montre aussi le climat spirituel et moral de l'époque: la portée du cartésianisme sur les esprits, l'influence du jansénisme, le malaise d'une noblesse encore secouée par l'échec de la Fronde.

Il y a chez Madame de Sévigné un désir très fort de briller et de plaire. L'art épistolaire est à la mode au XVIIème siècle et l'auteur sait que ses lettres, si elles sont bien tournées, ont des chances d'être lues publiquement dans les salons de la bonne société. Il y a donc peu de réelles confidences et de détails intimes: ces lettres ont un caractère social. La futilité et le bavardage sont, à certains moments, inévitables, mais la coquetterie littéraire n'altère pas les trois qualités principales de sont style: la vivacité, le naturel et la variété. L'élocution aisée, la spontanéité, de jolies trouvailles d'expression font le charme de son écriture. Sous sa plume rien n'est banal, elle a le don de la mise en scène et l'art de trouver chaque fois le côté accrocheur des choses.

Les lettres de madame de Sévigné sont autant de tableaux des gens et des choses de son époque. On y voit vivre une femme brillante et à l'aise dans son millieu. Elle fait partie de ce que l'on appelle les auteurs mondains.

LETTRES DE MADAME DE SEVIGNE

De 1670 à 1680, un énorme scandale agite Paris; il s'agit de l'Affaire des poisons. La marquise de Brinvilliers, accusée de meurtre, révèle sous la torture les détails de cette affaire, qui touche des personnages imprtants de la cour. Trente-quatre condamnations à mort sont prononcées et exécutées, notamment celle de la Brinvilliers que nous raconte ci-dessous madame de Sévigné.

Enfin c'en est fait, la Brinvilliers est en l'air. Son pauvre petit corps a été jeté, après l'exécution, dans un fort grand feu, et les cendres au vent, de sorte que nous la respirerons, et par la communication des petits esprits, il nous prendra quelque humeur empoisonnante dont nous serons tous étonnés. Elle fut jugée dès hier. Ce matin, on lui a lu son arrêt, qui était de faire amende honorable à Notre-Dame et d'avoir la tête coupée, son corps brûlé, les cendres au vent. On l'a présentée à la question, elle a dit qu'elle n'en était pas besoin, et qu'elle dirait tout. En effet, jusqu'à cinq heures du soir elle a conté sa vie, encore plus épouvantable qu'on ne le pensait. Elle a empoisonné dix fois de suite son père (elle ne pouvait en venir à bout), ses frères et plusieurs autres. Et toujours l'amour et les confidences mêlés partout. Elle n'a rien dit contre Pennautier. Après cette confession, on n'a pas laissé de lui donner la question dès le matin, ordinaire et extraordinaire; elle n'en a pas dit davantage. Elle a demandé à parler à Monsieur le Procureur général; elle a été une heure avec lui. On ne sait point encore le sujet de cette conversation. A six heures on l'a menée, nue en chemise et la corde au cou, à Notre-Dame faire l'amende honorable. Et puis on l'a remise dans le même tombeau, où je l'ai vue, jetée à reculons sur de la paille, avec une cornette basse et sa chemise, un docteur auprès d'elle, le bourreau de l'autre côté. En vérité, cela m'a fait frémir. Ceux qui ont vu l'exécution disent qu'elle a monté sur l'échafaud avec bien du courage. Pour moi, j'étais sur le pont de Notre-Dame avec la bonne d'Escars; jamais il ne s'est vu tant de monde, ni Paris si ému ni si attentif. Et demandez-moi ce qu'on a vu, car pour moi je n'ai vu qu'une cornette, mais enfin ce jour était consacré à cette tragédie. J'en saurai demain davantage, et cela vous reviendra.
Lettre à madame Grignan (17 juillet 1676)


Encore un petit mot de Brinvilles. Elle est morte comme elle a vécu, c'est-à-dire résolument. Elle entra dans le lieu où l'on devait lui donner la question, et voyant trois seaux d'eau: "C'est assurément pour me noyer, car de la taille dont je suis, on ne prétend pas que je boive tout cela". Elle écouta son arrêt, dès le matin, sans frayeur ni sans faiblesse; et sur la fin, elle le fit recommencer, disant que ce tomberau l'avait frappée d'abord, et qu'elle en avait perdu l'attention pour le reste. Elle dit à son confesseur par le chemin, de faire mettre le bourreau devant elle, "afin de ne point voir, dit-elle, ce coquin de Desgrez qui m'a prise". Il était à cheval devant le tombereau. Son confesseur la reprit de ce sentiment; elle dit: "Ah, mon Dieu! Je vous en demande pardon; qu'on me laisse donc cette étrange vue". Et monta seule et nu-pieds sur l'échelle et sur l'échafaud, et fut un quart d'heure mirodée, rasée, redressée, par le bourreau; ce fut un grand murmure et une grande cruauté. Le lendemain on cherchait ses os, parce que le peuple disait qu'elle était sainte.
Lettre à madame de Grignan (22 juillet 1676)


Madame de Sévigné est profondément chrétienne; elle pratique l'examen de conscience et les lectures pieuses. Dans cette lettre à sa fille, abordant le grand sujet des fins dernières de l'homme, sans nuire aucunement à sa gravité, et lui imprime cependant ce tour vif et primesautier qui lui est propre. Et comme elle est humaine dans son humilité sans raideur.

A Paris, mercredi 16 mars 1672
Vous me demandez, ma chère enfant, si j'aime toujours bien la vie. Je vous avoue que j'y trouve des chagrins cuisants; mais je suis encore plus dégoutée de la mort: je me trouve si malheureuse d'avoir à finir tout ceci par elle, que si je pouvais retourner en arrière, je ne demanderais pas mieux. Je me trouve dans un engagement qui m'embarrasse: je suis embarquée dans la vie sans mon consentement; il faut que j'en sorte, cela m'assomme; et comment en sortirai-je? Par où? Par quelle porte? Quand sera-ce? En quelle disposition? Souffrirai-je mille et mille douleurs, qui me feront mourir désespérée? Aurai-je un trasport au cerveau? Mourrai-je d'un accident? Comment serai-je avec Dieu? Qu'aurai-je à Lui présenter? La crainte, la nécessité feront-elles mon retour vers Lui? N'aurai-je aucun autre sentiment que celui de la peur? Que puis-je espérer? Suis-je digne du paradis? Suis-je digne de l'enfer? Quelle alternative! Quel embarras! Rien n'est si fou que de mettre son salut dans l'incertitude; mais rien n'est si naturel, et la sotte vie que je mène est la chose du monde la plus aisée à comprendre. Je m'abime dans ces pensées, et je trouve la mort si terrible que je haïs plus la vie parce qu'elle m'y mène, que par les épines qui s'y rencontrent. Vous me direz que je veux vivre éternellement. Point du tout; mais si on m'avait demandé mon avis, j'aurais bien aimé à mourir entre les bras de ma nourrice: cela m'aurait ôté bien des ennuis et m'aurait donné le Ciel bien sûrement et bien aisément.


Une représentation d'Esther par les demoiselles de Saint-Cyr était un événement mondain plus encore que théâtrale: nous le voyons en lisant cette lettre adressée à madame de Grignan. Certes, madame de Sévigné a pris un vif plaisir à la pièce et  la juge avec finesse, mais ce qui compte avant tout pour elle, c'est d'avoir donné publiquement une bonne impression d'elle-même et d'avoir mérité l'attention du roi.

A Paris ce lundi 21 février 1689
Je fis ma cour l'autre jour à Saint-Cyr, plus agréablement que je n'eusse jamais pensé. Nous y allâmes samedi, madame de Coulanges, madame de Bagnols, l'abbé Têtu et moi. Nous trouvâmes nos places gardées. Un officier dit à madame de Coulanges que madame de Maintenon lui faisait garder un siège auprès d'elle: vous voyez quel honneur. "Pour vous madame, me dit-il, vous pouvez choisir". Je me mis avec madame de Bagnols au second banc derrière les duchesses. Le maréchal de Bellefonds vint se mettre, par choix, à mon côté droit, et devant c'étaient mesdames 'Auvergne, de Coislin, de Suley.

Nous écoutâmes, le maréchal et moi cette tragédie avec une attention qui fut remarquée, et de certaines louanges sourdes et bien placées qui n'étaient peut-être pas sous les fontanges de toutes les dames. Je ne puis vous dire l'excès de l'agrément de cette pièce: c'est une chose qui n'est pas aisée à représenter, et qui ne sera jamais imitée; c'est un rapport de la musique, des vers, des chants, des personnes, si parfait et si complet, qu'on n'y souhaite rien, les filles qui font des rois et des personnages sont faites exprès: on est attentif et on n'a point d'autres peine que celle de voir finir une si aimable pièce; tout y est simple, tout y est innocent, tout y est sublime et touchant: cette fidélité de l'histoire sainte donne du respect; tous les chants convenables aux paroles qui sont tirées des Psaumes ou de la Sagesse, et mis dans le sujet, sont d'une beauté qu'on ne soutient pas sans larmes: la mesure de l'approbation qu'on donne à cette pièce, c'était du goût et de l'attention.

J'en fus charmée, et le maréchal aussi, qui sortit de la place pour aller dire au Roi combien il était content, et qu'il était auprès d'une dame qui était bien digne d'avoir vu Esther. Le Roi vint vers nos places, et après avoir tourné, il s'adressa à moi, et me dit: "Madame, je suis assuré que vous avez été contente". Moi, sans m'étonner, je répondis: "Sire, je suis charmée ce que je sens est au dessus des paroles". Le Roi me dit: " Racine a bien de l'esprit". Je lui dis: "Sire, il en a beaucoup; mais en vérité ces jeunes personnes en ont beaucoup aussi: elles entrent dans le sujet comme si elles n'avaient jamais fait autre chose". Il me dit: "Ah! pour cela, il est vrai". Et puis sa majesté s'en alla et me laissa l'objet de l'envie: comme il n'y avait quasi que moi  de nouvelle venue, il eut quelque plaisir de voir mes sincères admirations sans bruit et sans éclat. Monsieur le prince, madame la princesse me vinrent dire un mot; madame de Maintenon, un éclair: elle s'en allait avec le roi; je répndis à tout, car j'étais en fortune.

27 Ocak 2011 Perşembe


LE DISCOURS DE LA METHODE
 DE DESCARTES

Le Discours de la Méthode  pour bien conduire sa rasion et chercher la vérité dans les sciences est la première grande oeuvre philosophique et scientifique en français: Descartes veut être accessible à "ceux qui ne se servent que de leur raison naturelle toute pure".

"Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée... La puissance de bien juger et distinguer le vrai d'avec le faux, qui est proprement ce qu'on nomme le bon sens ou la raison, est naturellement égale en tous les hommes; et ainsi... la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies et ne considérons pas les mêmes choses. Car ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien". Pour expliquer la découverte de sa méthode, Descartes évoque la stérilité des études de sa jeunesse: lettres, histoire, mathématiques, théologie, morale. Son désir "de distinguer le vrai d'avec le faux" l'a entrainé à acquérir de l'expérience "dans le grand livre du monde", puis lui a inspiré la résolution d'étudier aussi en lui-même.

C'est dans son "poêle", en Allemagne, que Descartes décide de faire table rase de toutes ses connaissances antérieures et de reconstituer l'édifice de son savoir à la seule lumière de sa raison. Il expose les quatre règles de sa méthode.

"Preuves de l'existence de Dieu et de l'âme humaine"
Si je doute de tout, une seule chose échappe à ce doute: c'est le doute lui-même qui est en ma pensée. D'où cette vérité saisie par une intuition directe: "je pense, donc je suis". Et Descartes affirme l'existence de son âme, "substance dont toute l'essence ou la nature n'est que de penser", entièrement distincte du corps. Mais, le doute étant une imperfection, l'idée même du parfait qui est en nous entraine l'existence (qui est une forme de perfection) d'un Etre parfait, source de cette idée et auteur de notre être pensant. Dieu étant parfait ne peut nous tromper, et sa véracité nous garantit qu'à notre connaissance intellectuelle des choses par des idées claires et distinctes correspond la réalité permanente du monde extérieur.

"Ordre des questions de physique"
Les choses matérielles répondent à des lois "que Dieu a tellement établies en la nature, et dont il a imprimé de telles notions en nos âmes qu'après y avoir fait assez de réflexion nous ne saurions douter qu'elles ne soient exactement observées en tout ce qui est ou se fait dans le monde". Ainsi l'explication du monde matériel ne doit faire intervenir que les lois de l'étendue et du mouvement, à l'exclusion de toute action surnaturelle. Même la vie physique des êtres organisés, hommes ou animaux, s'explique uniquement par les lois générales de la matière, sans que l'âme y contribue. A ce propos, Descartes expose sa théorie de l'activité automatique du corps par l'action des "esprits animaux".

Les Animaux-Machines
L'homme possède une âme unie à son corps, auquel elle commande par sa volonté; au contraire, l'animal n'a qu'un corps dont les activités sont automatiques. Trois arguments prouvent la théorie des animaux-machines.
1)- Ils n'ont pas de langage articulé. "Et ceci ne témoigne pas seulement que les bêtes ont moins de raison que les hommes mais qu'elles n'en ont pas du tout". Car, chez les hommes, même les sourds et muets s'arrangent pour se faire comprendre.
2)- Leur faculté d'adaptation s'explique physiquement: l'instinct n'a rien de commun avec l'intelligence. "Ce qu'ils font mieux que nous ne prouve pas qu'ils ont de l'esprit, car, à ce compte, ils en auraient plus qu'aucun de nous, et feraient mieux en toute autre chose; mais plutôt qu'ils n'en ont point, et que c'est la nature qui agit en eux selon la disposition de leurs organes: ainsi qu'on voit qu'une horloge, qui n'est composée que de roues et de ressorts, peut compter les heures et mesurer le temps plus justement que nous avec toute notre prudence".
3)- Ils n'ont donc pas d'âme. "Après l'erreur de ceux qui nient Dieu, il n'y en a point qui éloigne plutôt les esprits faibles du chemin de la vertu que d'imaginer que l'âme des bêtes soit de même nature que la nôtre, et que par conséquent nous n'avons rien à craindre ni à espérer après cette vie, non plus que les mouches et les fourmis". Ayant ainsi refusé d'accorder une âme aux animaux, Descartes affirme au contraire que l'âme de l'homme, "entièrement indépendante du corps", est immortelle.

Conditions "pour aller plus avant": le progrès scientifique
Descartes proclame qu' "il est possible de parvenir à des connaissances qui soient fort utiles à la vie" et de "nous rendre comme maitres et possesseurs de la nature". Pour y parvenir, il a eu l'idée d'inviter les bons esprits à se communiquer les découvertes, "afin que les derniers commençant où les précédents auraient achevé, et ainsi joignant les vies et les travaux de plusieurs, nous allassions tous ensemble beaucoup plus loin que chacun en particulier ne saurait faire". Les savants lutteront pour le progrès, "car c'est véritablement donner des batailles que de tâcher à vaincre toutes les difficultés et les erreurs qui nous empêchent de parvenir à la connaissance de la vérité".

Le Traité des Passions
Il est important de connaitre le Traité des Passions de l'âme. La théorie physiologique de l'origine des passions est aujourd'hui abandonnée, mais elle nous aide à mieux comprendre la psychologie cornélienne et à dominer nos passions.

1)- "La machine de notre corps"
Le cerveau est relié aux organes des sens, aux muscles et au coeur par les nerfs, tuyaux imperceptibles où circulent les "esprits animaux", parties du sang rendues très subtiles par la chaleur du coeur. Les "mouvements excités dans les organes des sens par leurs objets" entrainent dans les nerfs qui vont au cerveau un courant d'esprits animaux qui prennent spontanément leur cours, selon leur forme, leurs dimensions, "vers certains muscles plutôt que vers d'autres" et meuvent nos membres. Par exemple, devant un danger, les esprits se rendent automatiquement "dans les nerfs qui servent à tourner le dos et remuer les jambes pour s'enfuir". Ainsi s'expliquent, chez les hommes, les réflexes et, chez les bêtes, tous leurs mouvements: c'est en ce sens qu'elles sont, pour Descartes, des "machines".

2)- Les fonctions de l'âme
Au contraire, l'homme est doué d'une âme en relation avec le corps par l'intermédiaire de la glande pinéale qui, placée au millieu du cerveau, est extrêmement sensible. Tout afflux des esprits animaux consécutif à une impression des sens extérieurs détermine un mouvement de la glande qui se transmet fidèlement â l'âme et lui donne la perception de la sensation. A son tour, l'âme douée de volonté peut, en agissant sur la glande, commander le déplacement des esprits animaux vers tel muscle et combattre les mouvements provoqués par l'automatisme.
A)- Les "Passions"
A côté des perceptions qui nous font connaitre le monde extérieur, il en est qui sont intérieures et qu'on appelle les passions de l'âme. Ce sont des "émotions de l'âme" (admiration, amour, haine, désir, joie et tristesse) "qui sont causées, et entretenues, et fortifiées par quelque mouvement des esprits animaux". Elles incitent l'âme à "consentir et contribuer aux actions qui peuvent servir à conserver le corps" et que l'automatisme du corps tend déjà à réaliser. Par exemple, devant le danger, le corps tend à fuir, et, parallèlement, les esprits animaux qui parviennent au cerveau sont "propres à entretenir et fortifier la passion de la peur". Ainsi l'âme subit ses "passions", qui ont une cause physiologique, le mouvement des esprits animaux. Les passions sont bonnes ou mauvaises selon qu'elles sont conformes ou non à la raison. Mais, pour combattre les passions qu'elle juge mauvaises, l'âme a aussi ses "actions", c'est-à-dire ses volontés qui sont absolument en son pouvoir.
B)- La volonté et les passions
La volonté ne peut pas directement changer nos passions, car elles s'accompagnent d'une "émotion" des esprits animaux qui s'impose à l'âme. "Le plus que la volonté puisse faire pendant que cette émotion est en sa vigueur, c'est de ne pas consentir à ses effets, et de retenir plusieurs des mouvements auxquels elle dispose le corps. Par exemple, si la peur incite les gens à fuir, la volonté les peut arrêter". Mais notre volonté peut agir indirectement sur nos passions que nous voulons avoir et qui sont contraires à celles que nous voulons rejeter. Ainsi pour exister en soi la hardiesse et ôter la peur, il ne suffit pas d'en avoir la volonté, mais il faut s'appliquer à considérer les raisons, les objets ou les exemples qui persuadent que le péril n'est pas grand; qu'il y a toujours plus de sûreté en la défense qu'en la fuite, qu'on aura de la gloire et de la joie d'avoir vaincu au lieu qu'on ne peut atteindre que du regret et de la honte d'avoir fui et choses semblables. C'est cette conception qui éclaire la psychologie cornélienne. On voit en effet que la volonté peut directement suspendre les actes dictées par les passions, qu'elle peut indirectement combattre ses passions en suscitant des passions contraires, et même qu'elle peut faire naitre des passions conformes à sa tendance raisonable, aussi authentique que celles qu'elle veut repousser.
C)- Ames fortes et âme faibles
Les âmes fortes sont celles dont la volonté combat les passions mauvaises avec ses propres armes, c'est-à-dire "des jugements fermes et déterminés touchant la connaissance du bien et du mal, suivant lesquels elle a résolu de conduire les actions de sa vie". Les âmes faibles en sont réduites à combattre une passion par une autre, par exemple en opposant à la peur, qui provoque la fuite, l'ambition "qui représente l'infâmie de cette fuite comme un mal pire que la mort": "ces deux passions agitent diversement la volonté, laquelle obéissant tantôt à l'une, tantôt à l'autre, s'oppose continuellement à soi-même et rend ainsi l'âme esclave et malheureuse". Mais "il n'y a point d'âme si faible qu'elle ne puisse, étant bien conduite, acquérir un pouvoir absolu sur ses passions"

3)- La générosité
"Je ne remarque en nous qu'une seule chose qui nous puisse donner juste raison de nous estimer, à savoir l'usage de notre libre arbitre, et l'empire que nous avons sur nos volontés; car il n'y a que les seules actions qui dépendent de ce libre arbitre pour lesquelles nous puissions avec raison être loués ou blâmés; et il nous rend en quelque façon semblables à Dieu en nous faisant mettre de nous-même... Ainsi, je crois que la vraie générosité qui fait qu'un homme s'estime au plus haut point qu'il se peut légitimement estimer, consiste seulement partie en ce qu'il connait qu'il n'y a rien qui véritablement lui appartienne que cette libre disposition de ses volontés, ni pourquoi il doive être loué ou blâmé sinon pour ce qu'il en use bien ou mal, et partie en ce qu'il sent en soi-même une ferme et constante résolution d'en bien user, c'est-à-dire de ne manquer jamais de volonté pour entreprendre et exécuter toutes les choses qu'il jugera être les meilleures: ce qui est suivre parfaitement la vertue".

La générosité qui appartient aux âmes bien nées, "sert de remède contre tous les dérèglements des passions". Semblables aux héros cornéliens, les généreux "sont naturellement portés à faire de grandes choses, et toutefois à ne rien entreprendre dont ils ne se sentent capables"; ... ils sont entièrement maitres de leurs passions, particulièrement des désirs, de la jalousie, et de l'envie, et de la haine, et de la peur, et de la colère". Aussi les généreux, ayant conscience de suivre parfaitement la vertu, "en reçoit une satisfaction qui est si puissante pour le rendre heureux que les plus violents et forts des passions n'ont jamais assez de pouvoirs pour troubler la tranquilité de son âme".

L'INFLUENCE CARTESIENNE
On ne peut pas parler d'influence avant 1650. Descartes témoin de l'esprit contemporain, a donné une expression nette et définitive aux tendances confuses de son temps vers l'ordre et la logique. Cette harmonie avec Descartes apparait surtout chez Cornéille, dont le théâtre fait une si large place à la raison et à la grandeur d'âme, et dont la psychologie annonce le Traité des passions, paru treize ans après le Cid.

Molière, La Fontaine et même Pascal formaient avant 1650, sont peu sensibles à son influence. Au contraire, chez Bossuet la structure des développements rappelle les "longues chaines de raison" dont rêvait Descartes; Boileau admire en lui le penseur qui a proclamé la souveraineté de la raison et la Bruyère lui doit l'essentiel de sa philosophie.

Descartes n'a pas tué le lyrisme et le sentiment de la nature, mais il a contribué à orienter la littérature vers l'expression des idées et les analyses psychologiques et morales. Heureusement, l'esthétique des classiques déborde d'étroite conception cartésienne des idées pures et abstraites; à l'exemple des anciens, ils conçoivent l'oeuvre d'art comme une imitation de la vie où interviennent la sensibilité et l'iamgination: plus ouvert à l'influence antique, Racine est moins marqué de cartésianisme.

Dès la fin du XVIIème siècle, le cartésianisme va détruire l'art classique et l'esprit religieux. Les "Modernes" sont des cartésiens qui rejettent l'autorité des anciens et condamnent la poésie: les philosophes du siècle suivant créent une littérature d'idées, toute d'exactitude et de pression. L'esprit cartésien va dominer presque tout le travail philosophique. Selon G. Lanson, bien des "faiseurs de systèmes" du XVIIIème siècle partent de principes et de définitions à priori. Enfin, le goût de la certitude rationnelle a conduit les "philosophes" à rejeter tout principe d'autorité: même les questions politiques et religieuses seront soumises à un audacieux examen critique, ce que Descartes n'avait pas souhaité.

26 Ocak 2011 Çarşamba


 EXTRAITS DES « PENSEES » de PASCAL


Méditant sur le récit de saint Matthieu avec l’intuition ardente des grands mystiques, Pascal revit l’agonie du Christ : il entre en sympathie avec les souffrances, surtout avec la terrible sollitude morale de Jésus. Deux motifs obsédants reviennent sans cesse : l’abandon de Jésus par les hommes, la bonté de Jésus qui les sauve malgré eux. Au moment où, plein d’angoisse, le janséniste cherche la voie du salut, au fond de son âme la parole de son sauveur se fait entendre, rassurante et douce, pour lui apporter la paix des certitudes : oui, il est élu, prédestiné ; et dans l’émoi de l’extase, il fait à ce Dieu qui l’a choisi le don total et fervent de lui-même.

Le mystère de Jésus. – Jésus souffre dans sa passion les turments que lui font les hommes ; mais dans l’agonie il souffre des tourments qu’il se donne à lui-même : turbare semetipsum (se torturer soi-même). C’est une suplice d’une main non humaine, mais toute puissante, car il faut être tout-puissant pour le soutenir.

Jésus cherche quelque consolation au moins dans ses trois plus chers amis et ils dorment ; il les prie de soutenir un peu avec lui, et ils le laissent avec une négligeance entière, ayant si peu de compassion qu’elle ne pouvait seulement les empêcher de dormir un moment. Et ainsi Jésus était délaissé seul à la colère de Dieu.

Jésus est seul dans la terre, non seulement qui ressente et partage sa peine, mais qui la sache : le ciel et lui sont seuls dans cette connaissance.

Jésus est dans un jardin, non de délices comme le premier Adam, où il se perdit et tout le genre humain, mais dans un de supplices, où il s’est sauvé et toutle genre humain.

Il souffre cette peine et cet abandon dans l’horreur de la nuit.

Je crois que Jésus ne s’est jamais plaint que cette seule fois ; mais alors il se plaint comme s’il n’eût plus contenir sa douleur excessive : « Mon âme est triste jusqu’à la mort ».

Jésus cherche de la compagnie et du soulagement de la part des hommes. Cela est unique en toute sa vie, ce me semble. Mais il n’en reçoit point, car ses disciples dorment.

Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde : il ne faut pas dormir pendant ce temps-là.

Jésus au millieu de ce délaissement universel et de ses amis choisis pour veiller avec lui, les trouvant dormant, s’en fâche à cause du péril où ils exposent non lui, mais eux-mêmes, et les avertit de leur propre salut et de leur bien avec une tendresse cordiale pour eux pendant leur ingratitude, et les avertir que l’esprit est prompt et la chair infirme.

Jésus les trouvant encore dormant, sans que ni sa considération ni la leur les en eût retenus, il a la bonté de ne pas les éveiller, et les laisse dans leur repos.

Jésus prie dans l’incertitude de la volonté du Père, et craint la mort ; mais,l’ayant connue, il va au-devant s’offrir à elle : Eamus, Processit (Allons, Il s’avance).

Jésus a prié les hommes, et n’en a pas été exaucé.

Jésus pendant que ses disciples dormaient, a opéré leur salut. Il l’a fait à chacun, des justes pendant qu’ils dormaient, et dans le néant avant leur naissance, et dans les péchés depuis leur naissance.

Il ne prie qu’une fois que le calice passe et encore avec soumission, et deux fois qu’il vienne s’il le faut.
Jésus dans l’ennui.

Jésus, voyant tous ses amis endormis et tous ses ennemis vigilants, se remet tout entier à son Père.

Jésus ne regarde pas dans Judas son intimité, mais l’ordre de Dieu qu’il aime, et la voit si peu qu’il l’appelle ami.

Jésus s’arrache d’avec ses disciples pour entrer dans l’agonie ; il faut s’arracher de ses plus proches et des plus intimes pour l’imiter.

Jésus étant dans l’agonie et dans les plus grandes peines, prions plus longtemps. Nous implorons la miséricorde de Dieu, non afin qu’il nous laisse en paix dans nos vices, mais afin qu’il nous en délivre.

Si Dieu nous donnait des maitres de sa main, oh ! qu’il leur faudrait obéir de bon cœur ! La nécessité et les événements en sont infailliblement.
_ « Console-toi, tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais trouvé.
« Je pensais à toi dans mon agonie, j’ai versé telles gouttes de sang pour toi.
« C’est me tenter plus que t’éprouver, que de penser si tu ferai bien telle et telle chose absente : je la ferai en toi si elle arrive.
« Laisse-toi conduire à mes règles, vois comme j’ai bien conduit la Vierge et les saints qui m’ont laissé agir en eux.
« Le Père aime tout ce que Je fais.
« Veux-tu qu’il me coûte toujours du sang de mon humanité, sans que tu donnes des larmes ?
« C’est mon affaire que ta conversion ; ne crains point, et prie avec confiance comme pour moi.
« Je te suis présent par ma parole dans l’Ecriture, par mon esprit dans l’Eglise et par les inspirations, par ma puissance dans les prêtres, par ma prière dans les fidèles.
« Les médecins ne te guériront pas, car tu mourras à la fin. Mais c’est moi qui guéris et rends le corps immortel.
« Souffre les chaines et la servitude corporelle ; je ne te délivre que de la spirituelle à présent.
« Je te suis plus un ami que tel et tel ; car j’ai fait pour toi plus qu’eux, et ils ne souffriraient pas ce que j’ai souffert de toi et ne mourraient pas pour toi dans le temps de tes infidélités et cruautés, comme j’ai fait et comme je suis prêt à faire, et fais dans mes élus et au Saint Sacrement.
« Si tu connaissais tes péchés, tu perdrais cœur ».
_ Je le perdrai donc, Seigneur, car je crois leur malice sur votre assurance.
_ « Non, car moi, par qui tu l’apprends, t’en peux guérir, et ce que je te le dis est un signe que je te veux guérir. A mesure que tu les expieras, tu les connaitras, et il te sera dit : « Vois les péchés qui te sont remis». Fais donc pénitence pour tes péchés cachés et pour la malice occulte de ceux que tu connais ».
_ Seigneur, je vous donne tout.
_  « Je t’aime plus ardemment que tu n’as aimé tes souillures, ut immundus pro luto (Comme un animal immonde aime sa fange). Qu’à moi en soit la gloire et non à toi, ver et terre.
« Interroge ton directeur, quand mes propres paroles te sont occasion de mal, et de vanité ou curiosité ».
_ Je vois mon abime d’orgueil, de curiosité, de concupiscence. Il n’y a nul rapport de moi à Dieu, ni à Jésus-Christ juste. Mais il a été fait péché par moi ; tous vos fléaux sont tombés sur lui. Il est plus abominable que moi, et, loin de m’abhorrer, il se tient honoré que j’aille à lui et le secoure.
Mais il s’est guéri lui-même, et me guérira à plus forte raison.
Il faut ajouter mes plaies aux siennes, et me joindre à lui, et il me sauvera en se sauvant. Mais il n’en faut pas ajouter à l’avenir.

LE MEMORIAL

Le mémorial est l’écrit le plus intime de Pascal. Ce bout de papier qui relate son expérience mystique lors d’une nuit inoubliable de 1654, a été trouvé dans la doublure de son manteau après sa mort: il portait ce souvenir en permanence sur lui. Pascal a fait une copie au propre de son premier jet; un ami intime en a tiré une troisième copie. Il faut noter que les trois dernières lignes du Mémorial sont absentes dans un des autographes. Cette copie accompagnait le parchemin du Mémorial, aujourd’hui disparu. On comprend d’après cet autographe, les difficultés que présente la lecture du manuscrit des Pensées.

L'an de grâce 1654,
Lundi, 23 novembre, jour de saint Clément, pape et martyr, et autres au martyrologe.
Veille de saint Chrysogone, martyr, et autres,
Depuis environ dix heures et demie du soir jusques environ minuit et demi,
FEU¹.
« DIEU d'Abraham, DIEU d'Isaac, DIEU de Jacob »², non des philosophes et des savants.
Certitude. Certitude. Sentiment. Joie. Paix³.
DIEU de Jésus-Christ.
Deum meum et Deum vestrum*¹.
« Ton DIEU sera mon Dieu. »*²
Oubli du monde et de tout, hormis DIEU.
Il ne se trouve que par les voies enseignées dans l'Évangile.
Grandeur de l'âme humaine.
« Père juste, le monde ne t'a point connu, mais je t'ai connu. »*³
Joie, joie, joie, pleurs de joie.
Je m'en suis séparé:
Dereliquerunt me fontem aquae vivae¹¹.
« Mon Dieu, me quitterez-vous ? » ²²
Que je n'en sois pas séparé éternellement.
« Cette³³ est la vie éternelle, qu'ils te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. »
Jésus-Christ. Jésus-Christ.
Je m'en suis séparé; je¹¹¹ l'ai fui, renoncé, crucifié.
Que je n'en sois jamais séparé.
Il ne se conserve que par les voies enseignées dans l'Évangile:
Renonciation totale et douce.
Soumission totale à Jésus-Christ et à mon directeur.
Éternellement en joie pour un jour d'exercice sur la terre.
Non obliviscar sermones tuos²²². Amen.

Explications►
¹: Feu; mot isolé au millieu de la ligne : feu intérieur de la certitude, ou vision surnaturelle éblouissante.
² : Exode, III, 6 : Dieu se définit ainsi à Moïse ; définition reprise par Jésus (Matth., XXII, 32)
³ : Ligne ajoutée après coup, dan l’exaltation de la certitude.
*¹ : Jean, XX, 17 : « (Je monte vers) mon Dieu et votre Dieu »
*² : Ruth (I, 16) : paroles de Ruth à sa belle-mère Noémi.
*³ : Jean, XVII, 25, où Jésus apparait comme « médiateur »
¹¹ : « Ils m’ont abandonné, moi la source d’eau vive » (reproche de l’Eternel aux Hébreux, dans Jérémie, II, 13)
²² : Mathh., XXVII, 46. Cri d’angoisse de Jésus sur la croix, qui reprend un psaume prophétique (XXII, 2.
³³ : Cette : cela (annonce « qu’ils te connaissent… ». Paroles de Jésus à Dieu (Jean, XVII, 3.)
¹¹¹ : Fin de phrase ajoutée en surcharge
²²² : « Je n’oublierai pas tes paroles ». (Ps. CXVIII, 16.)

 PASCAL, "PENSEES SUR LA POLITIQUE"

Scientifique et philosophe de génie, écrivain et polémiste redoutable, Pascal est un de ces géants qu'ait produit l'histoire. Nous le connaissons surtout par son livre « Les Pensées », bréviaire des pessimistes comme Cioran, ou livre de chevet de Nietzsche. Déroutant d'un bout à l'autre, écrit en vue de l'apologie de la religion chrétienne, ce livre passe pour une mine de réflexions profondes en tout genre concernant la condition des hommes. Chacun connaît les fragments sur les deux infinis, le pari ou encore le divertissement. Ce qu'on connaît moins, c'est que Pascal y développe aussi une pensée politique. Certes, il n'y a pas à proprement parler une philosophie politique chez Pascal au sens où les thèmes de pouvoir, de justice ou de force ne sont pas thématisés. Dispersées et souvent elliptiques, les Pensées de Pascal n'enferme pas moins un ensemble de considérations politiques dont la cohérence nous échappe. Je voudrais dans ces lignes modestes en dire quelques mots sur cet aspect peu connu des « Pensées ».

Il serait d'ailleurs surprenant que Pascal n'eut pas à réfléchir sur la politique, lui qui s'engagea avec détermination dans un conflit qui marquera l'histoire de France et de l'Eglise: la querelle des « Provinciales ». Pascal n'est pas dupe. Ne croyant en rien, hormis en Dieu (d'Abraham, d'Isaac et de Jacob), il jette une lumière crue sur la condition humaine. Les lois, la justice, la tradition, le progrès sont inventions d'hommes, néanmoins nécessaires et inévitables, mais dépourvues de toute justification. Ils ne sont certes pas dépourvues de raison, car sans cause pas d'effet, mais ces causes ne sont pas ultimes, c'est-à-dire divines mais simplement désespérément humaines. Il n'y a que des faits, et les faits tout têtus qu'ils sont ne valent rien parce qu'ils ne peuvent rien fonder. « Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie » (206) (1). L'univers ne nous parle pas, le monde ne nous dit rien. Exit Galilée car il se trompe. L'espace galiléen n'a rien à dire; le monde n'est pas un livre ouvert dont les mathématiques seraient la langue.

La physique cartésienne est aussi incapable de nous proposer un sens. Quel homme, fût-ce le plus idiot, pourrait espérer son salut d'un morceau de cire? Par quoi Descartes est « inutile et incertain » (78). Que dire du progrès? Fait-il sens? Peut-être, mais ce sens progresse-t-il? Et vers quoi? (voir la « Préface sur le Traité du vide »). L'histoire avec son cortège d'absurdités ne nous éclaire pas davantage. Bref, le monde des faits est désespérément réel. Ni le monde, ni l'histoire, ni la raison ne sont Dieu. Qui adore ces vérités est un idolâtre ? Elles existent et sont vraies, mais elles ont leur limites. Pascal n'a jamais renié la connaissance rationnelle, mais il n'a cesse d'en souligner la relativité. Le vrai renferme son incertitude propre et ne peut se prononcer sur le bien. La raison, « elle a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses » (82). Vivre selon la société nous pousse à mentir, à l'égoïsme et au divertissement (101, 455, 100 dernier paragraphe, 141 et 140). Quant à l'histoire, elle n'est qu'impermanence et vanité (hormis la pérennité de l'Eglise). Les états ne durent pas plus de mille ans - (614). En plus tout y est soumis à l'insignifiance. Rappelons-nous du nez de Cléopâtre et du grain de sable dans la vessie de Cromwell (162 et 176). Pascal récuse tout optimisme naturaliste, historique et rationaliste. Croire en l'homme, c'est se leurrer gravement, car s'il y a une espérance, elle est à placer en Dieu et non en l'homme. La nature humaine étant corrompue à cause du péché originel, en matière des affaires humaines il n'y a rien qui puisse être digne de nos aspirations. Pascal s'emploie dans ses Pensées à montrer sans relâche qu'il n'y a ni justice naturelle, ni pouvoir véritablement légitime ». Il y a sans doute des lois naturelles; mais cette belle raison corrompue a tout corrompu » (294). L'homme animal dénaturé, plus exactement déchu de sa véritable nature, produit des effets, et l'ensemble de ceux-ci forme le « fait », le fait de la force et des rapports de force, c'est-à-dire la lutte pour le pouvoir et sa conservation ». Les enfants étonnés voient leur camarade respecté » (321) Pourquoi respecter celui-là, plutôt qu'un autre se demandent-ils? N'est-il pas comme nous, ou même moins fort que nous physiquement? Mais il est fils de roi ou fils de duc. En lui il n'y a aucune valeur intrinsèque. Objectivement, il ne vaut rien, mais c'est un fait. Et ce fait est une force ». Cela est admirable, écrit Pascal, on ne veut pas j'honore un homme vêtu de brocatelle et suivi de sept ou huit laquais! Eh quoi! Il me fera donner les étrivières, si je ne le salue. Cet habit est une force » (315)

Tout ce qui s'expose sous nos yeux comporte une duplicité foncière. La richesse même indue et imméritée n'en reste pas moins une richesse ». Le respect est: incommodez-vous. Cela est vaine en apparence, mais très juste; car c'est dire: je m'incommoderai bien si vous en aviez besoin, puisque je le fais bien sans que cela vous serve... » (317).Tout cela est vain et cependant nécessaire, car la force y est. L'effet par lui-même est ridicule, mais il est force. Autrement dit, tout est simulacre et en politique les simulacres ne valent que parce qu'elles renvoient à un pouvoir. Pourquoi suit-on la pluralité? Est-ce à cause qu'ils ont plus de raison? Non, mais plus de force » (301)

Il n'y a donc que la force et c'est la politique même. Avoir raison ne signifie rien en la matière. Sur ce plan, ce n'est pas la raison qui dicte sa loi, mais la force. Que vaut en effet la démocratie sans la force des démocrates? Pour avoir la paix il faut la victoire et il n'est de victoire que de la force (298).

Mais cette force, que sert-elle? Pascal répond: la concupiscence ». Qu'est-ce, à votre avis, d'être grand seigneur? C'est être maître de plusieurs objets de la concupiscence des hommes, et ainsi pouvoir satisfaire aux besoins et aux désirs de plusieurs » (Troisième discours sur la condition des Grands). La force et la concupiscence sont les sources de toutes nos actions (334) Ici, Pascal est très proche de Spinoza. Il n'y a donc que le désir de pouvoir et la force du désir est de vouloir croître et dominer. Les faits politiques ne sont que forces et rapports de forces.

La justice n'y échappe pas non plus, car elle est un fait elle aussi. Elle s'établit à partir de la force. Que serait, en effet le droit sans la force de l'Etat (et inversement)?  « La justice est ce qui est établi; et ainsi toutes nos lois établies seront nécessairement tenues pour juste sans être examinées, puisqu'elles sont établies » (312). Cette acceptation bien que nécessaire dénote cependant la faille qui les habite. Nous ne connaissons pas le vrai bien (nous l'avons perdu), mais «  nous connaissons le mal et le faux (...) et nous n'avons le vrai et le bien qu'en partie » (385). Ce qui nous permet évidemment de critiquer telle ou telle loi et la trouver injuste. Si par cette épistémologie négative Pascal annonce Popper, en revanche sa morale négative est anti-rousseauiste. Une phrase comme « l'épée donne un véritable droit » (878) est vigoureusement contestée par Rousseau au livre 1 de son Contrat Social. « La force ne produit aucun droit ». C'est que Pascal en politique ne cherche pas à fonder un ordre nouveau. Ne nourrissant aucune illusion quant à l'homme, il ne tient compte que des faits. Ce qui doit être relève d'un autre ordre qui n'appartient pas à l'histoire. Pascal explique plus qu'il ne fonde, car il ne peut y avoir de politique parfaite. La politique est une justification de fait et non de droit parce qu'elle n'est pas en mesure de se justifier pleinement pour la simple raison que nous ne sommes pas en « régime de grâce ».

La fêlure causée par le péché a disjoint l'économie de la création provoquant par là-même une disjonction des divers ordres entre eux. Ainsi, « De tous les corps ensemble, on ne saurait en faire réussir une petite pensée: cela est impossible, et d'un autre ordre. De tous les corps et esprits, on n'en saurait tirer un mouvement de vraie charité, cela est impossible, d'un autre ordre, surnaturel » (793).

Chez Pascal, les trois ordres sont irrémédiablement disjointes et irréconciliables. Distinctes et opposés (460). La charité est supérieure à la raison (ou à l'esprit), et la raison au corps. Il y a là certes une hiérarchie mais elle est inefficace. Ces trois ordres sont transcendants l'un par rapport à l'autre. C'est dire qu'ils ne peuvent se communiquer. Vouloir établir une immanence entre eux est vanité. C'est pourquoi nous consentons à jouer un rôle malgré nous car les apparences nous servent et parce qu'elles cachent notre vraie misère. Mais ces trois ordres sont nécessairement nôtres. Il est vain de vouloir de choisir; cela reviendrait à nier notre humanité. Chaque ordre est indépendant et clos sur lui-même. D'où l'impossibilité d'une politique juste, équitable et vraie. La dialectique pascalienne n'ouvre nullement sur un dépassement comme on peut le croire. La clôture des ordres et leur incommunicabilité interdisent d'aboutir à une synthèse (de type hégélien). Comment la charité tiendrait lieu de force, et comment la force la charité? Et comment ensemble (ou séparées) de raison?

La politique est le lieu où se reflète cette impossibilité d'un vivre-ensemble des ces trois ordres. Ceux-ci ne suffisent pas. Pas d'avantage la politique à faire accéder à un ordre supérieur. Tout homme pris dans ces trois ordres est à la fois fini et incomplet. Fini parce qu'il ne peut y échapper, incomplet, parce qu'il aspire justement à la plénitude, à autre chose que soi. Nulle force, nulle vérité, nul amour peuvent le satisfaire hormis Dieu, de qui viennent toute force, toute vérité et tout amour. Mais cela n'est pas de ce monde, et c'est par quoi le monde n'est pas Dieu. La séparation est radicale mais pas sans issue. Mais le fait qu'on ne puisse passer d'un ordre à un autre, ni nous contenter d'aucun d'entre eux forme le tragique de l'homme et de la politique. Ce tragique menace constamment la politique. Certes l'ordre politique et juridique est admirable, mais sans véritable bien qu'est Dieu selon Pascal. C'est une « fausse image », car les intérêts de chacun devenus sacro-saints, les forces en présence sont toujours les mêmes en plus exaspérées de nos jours. Nos démocraties sont à réinventer avec peut-être un peu plus de lucidité comme celle que Pascal promène sur nous et sur la politique.

*Les chiffres renvoient à la numérotation de Léon Brunschvicg, Pensées, Pascal, GF-Flammarion, 1976
*Préface d'André Comte Sponville dans son petit livre sur Pascal, Pensées sur la politique. (Rivages Poches, Petite Bibliothèque, 1992).

AUGUSTE UNAT

25 Ocak 2011 Salı


 L'ABBE PREVOST (1697-1763)
 MANON LESCAUT 

L'Abbé Antoine François Prévost est l'auteur d'une cinquante de romans mais son nom est surtout lié aux Mémoires et aventures d'un homme de qualité qui s'est retiré du monde, dont le tome VII est constitué par l'histoire de Manon Lescaut. L'auteur y décrit avec force la toute-puissance de la passion. Le jeune chevalier Des Grieux rencontre à Amiens une toute jeune fille, Manon, dont il tombe éperdument amoureux. Il l'enlève et s'installe avec elle à Paris. Mais Manon est volage. Elle se laisse séduire par d'autres amoureux et entraine son malheureux amant dans de multiples aventures. Des Grieux continuera quand même d'aimer Manon jusqu'à la mort de celle-ci.
Ce livre fait scandale et est condamné au feu, bien que son auteur le présente comme un exemple terrible de la force des passions.

Le chevalier des Grieux, le héros-narrateur, raconte à "l'homme de qualité", simple auditeur, sa fuite amoureuse avec Manon.

"J'employai la nuit à mettre ordre à mes affaires, et m'étant rendu à l'hôtellerie de Mlle Manon vers la pointe du jour, je la trouvai qui m'attendait. Elle était à sa fenêtre, qui donnait sur la rue, de sorte que, m'ayant aperçu, elle vint m'ouvrir elle-même. Nous sortimes sans bruit. Elle n'avait point d'autre équipage que son linge, dont je me chargeai moi-même. La chaise était en état de partir; nous nous éloignâmes aussitôt de la ville. Je rapporterai, dans la suite, quelle fut la conduite de Tiberge, lorsqu'il s'aperçut que je l'avais trompé. Son zèle n'en devint pas moins ardent. Vous verrez à quel excès il le porta et combien je devrais verser de larmes en songeant quelle en a toujours été la récompense.

Nous nous hâtâmes tellement d'avancer que nous arrivâmes à Saint-Denis avant la nuit. J'avais couru à cheval à côté de la chaise, ce qui ne nous avait guère permis de nous entretenir qu'en changeant de chevaux; mais lorsque nous nous vimes si proche de Paris, c'est-à-dire presque en sûreté, nous primes le temps de nous rafraichir, n'ayant rien mangé depuis notre départ d'Amiens. Quelque passionné que je fusse pour Manon, elle sut me persuader qu'elle ne l'était pas moins pour moi. Nous étions si peu réservés dans nos caresses, que nous n'avions pas la patience d'attendre que nous fussions seuls. Nous postillons et nos hôtes nous regardaient avec admiration, et je remarquais qu'ils étaient surpris de voir deux enfants de notre âge, qui paraissaient s'aimer jusqu'à la fureur. Nos projets de mariage furent oubliés à Saint-Denis; nous fraudâmes les droits de l'Eglise, et nous nous trouvâmes époux sans y avoir fait réflexion. Il est sûr que, du naturel tendre et constant dont je suis, j'étais heureux pour toute ma vie, si Manon m'eût  été fidèle. Plus je la connaissais, plus je découvrais en elle de nouvelles qualités aimables. Son esprit, son coeur, sa douceur et sa beauté formaient une chaine si forte et si charmante, que j'aurais mis tout mon bonheur à n'en sortir jamais. Terrible changement! Ce qui fait mon désespoir a pu faire ma félicité. Je me trouve le plus malheureux de tous les hommes, par cette même constance dont je devais attendre le plus doux de tous les sorts, et les plus parfaites récompenses de l'amour.

...............................................

Nous marchâmes aussi longtemps que le courage de Manon put la soutenir, c'est-à-dire environ deux lieues; car cette amante incomparable refusa constamment de s'arrêter plus tôt. Accablé enfin de lassitude, elle me confessa qu'il lui était impossible d'avancer davantage. Il était déjà nuit. Nous nous assimes au millieu d'une vaste plaine, sans avoir pu trouver un arbre pour nous mettre à couvert. Son premier soin fut de changer le linge de ma blessure, qu'elle avait pansée elle-même avant notre départ. Je m'opposai en vain à ses volontés. J'aurais achevé de l'accabler mortellement, si je lui eusse refusé la satisfaction de me croire à mon aise et sans danger, avant que de penser à sa propre conservation. Je me soumis durant quelques moments à ses désirs. Je reçus ses soins en silence et avec honte. Mais lorsqu'elle eut satisfait sa tendresse, avec quelle ardeur la mienne ne prit-elle pas son tour! Je me dépouillai de tous mes habits, pour lui faire trouver la terre moins dure en les étendant sous elle. Je la fis consentir, malgré elle, à me voir employer à son usage tout ce que je pus imaginer de moins incommode. J'échauffai ses mains par mes baisers ardents, et par la chaleur de mes soupirs. Je passai la nuit entière à veiller près d'elle, et à prier le Ciel de lui accorder un sommeil doux et paisible. O Dieu! que mes voeux étaient vifs et sincères! et par quel rigoureux jugement aviez-vous résolu de ne les pas exaucer?

Pardonnez, si j'achève en peu de mots un récit qui me tue. Je vous raconte un malheur qui n'eut jamais d'exemple. Toute ma vie est destinée à le pleurer. Mais quoique je le porte sans cesse dans ma mémoire, mon âme semble reculer d'horreur, chaque fois que j'entrepends de l'exprimer.


Abbé Prévost lisant Manon Lescaut
 Nous avions passé tranquillement une partie de la nuit. Je croyais ma chère maitresse endormie et je n'osais pousser le moindre souffle, dans la crainte de troubler son sommeil. Je m'aperçus dès le point du jour, en touchant ses mains, qu'elle les avait froides et tremblantes. Je les approchais de mon sein, pour les échauffer. Elle sentit ce mouvement; et faisant un effort pour saisir les miennes, elle me dit, d'une voix faible, qu'elle se croyait à sa dernière heure. Je ne pris d'abord ce discours que pour un langage ordinaire dans l'infortune, et je n'y répondis que par les tendres consolations de l'amour. Mais, ses soupirs fréquents, son silence à mes interrogations, le serrement de ses mains, dans lesquelles elle continuait de tenir les miennes, me firent connaitre que la fin de ses malheurs approchait. N'exigez point de moi que je vous décrive mes sentiments, ni que je vous rapporte ses dernières expressions.  Je la perdis; je reçus d'elle des marques d'amour, au moment même qu'elle expirait; c'est tout ce que j'ai la force de vous apprendre, de ce fatal et déplorable événement.

Mon âme ne suivit pas la sienne. Le ciel ne me trouva point, sans doute, assez rigoureusement puni. Il a voulu que j'aie trainé, depuis, une vie languissante et misérable. Je renonce volontairement à la mener jamais plus heureuse.

Je demeurai plus de vingt-quatre heures, la bouche attachée sur le visage et sur les mains de ma chère Manon. Mon dessein était d'y mourir; mais je fis réflexion, au commencement du second jour, que son corps serait exposé, après mon trépas, à devenir la pâture des bêtes sauvages. Je formai la résolution de l'enterrer et d'attendre la mort sur sa fosse. J'étais déjà si proche de ma fin, par l'affaiblissement que le jeûne et la douleur m'avaient causé, que j'eus besoin de quantité d'efforts pour me tenir debout. Je fus obligé de recourir aux liqueurs que j'avais apportées. Elles me rendirent autant de force qu'il en fallait pour le triste office que j'allais exécuter. Il ne m'était pas difficile d'ouvrir la terre, dans le lieu où je me trouvais. C'était une campagne couverte de sable. Je rompis mon épée, pour m'en servir à creuser, mais j'en tirais moins de secours que de mes mains. J'ouvris une large fosse. J'y plaçai l'idôle de mon coeur, après avoir pris soin de l'envelopper de tous mes habits, pour empêcher le sable de la toucher. Je ne la mis dans cet état qu'après l'avoir embrassée mille fois avec toute l'ardeur du plus parfait amour. Je m'assis encore près d'elle. Je la considarai longtemps. Je ne pouvais me résoudre à fermer la fosse. Enfin, mes forces recommencèrent à s'affaiblir, et craignant d'en manquer tout à fait avant la fin de mon entreprise, j'ensevelis pour toujours, dans le sein de la terre, ce qu'elle avait portait de plus parfait et de plus aimable. Je me couchai ensuite sur la fosse, le visage tourné vers le sable, et, fermant les yeux avec le dessein de ne les ouvrir jamais, j'invoquai le secours du Ciel et j'attendis la mort avec impatience. Ce qui vous paraitra difficile à croire, c'est que pendant tout l'exercice de ce lugubre ministère, il ne sortit point une larme de mes yeux ni un soupir de ma bouche. La consternation profonde où j'étais, et le dessein déterminé de mourir, avaient coupé le cours à toutes les expressions du désespoir et de la douleur. Aussi ne demerai-je pas longtemps dans la posture où j'étais sur la fosse, sans perdre le peu de connaissance et de sentiment qui me restait.
L'Abbé Prévost, La véritable histoire du Chevalier des Grieux
et de Manon Lescaut, 1731

RENE DESCARTES (1596-1650)

René Descartes naquit à La Haye entre Tours et Poitiers, en 1596. Il fut élevé chez les jésuites de la Flèche et montra de bonne heure un goût très vif pour les mathématiques, dont la méthode le séduisait par sa précision. Après voir achevé son droit, il voyagea. Il renonçait aux livres, comme il nous le dit lui-même avec quelques exagérations, pour étudier dans le grand livre du monde. Il vit la Hollande, l'Allemagne et l'Italie; il fut soldat pendant la guerre de Trente Ans. Il observait les hommes mais il était surtout attentif aux mouvements de sa popre pensée. Seul, l'hiver, dans son poêle le 10 novembre 1619, il eut comme une révélation métaphysique, suivie d'une sorte d'extase. Il découvrait toute une science et une philosophie nouvelles, l'application de l'algèbre à la géométrie et l'application de la méthode des mathématiques à la métaphysique. En 1636, quand son système lui parait sufisamment mûri, il en fait connaitre les grandes lignes dans le Discours de la Méthode. Il mourut en 1650 en Suède, où la reine Christine l'avait attiré.

DESCARTES & LA PHILOSOPHIE 
Descartes a fait une véritable révolution en philosophie. D'après lui, tout progrès était impossible dans la spéculation philosophique, si on ne commençait pas par renoncer à la méthode aristotélicienne mise à la mode par la scolastique, pour lui substituer une méthode plus pratique issue des mathématiques.

Cette méthode, il l'a exposée dans le Discours de la Méthode. Les principes essentielles en sont les suivantes: en toute chose ne se rendre qu'à l'évidence; n'accepter pour vrai que ce qui est clair et distinct; décomposer les questions par une analyse minutieuse jusqu'à ce qu'on rencontre les éléments irréductibles dont toutes choses sont faites; à l'aide de ces éléments par le jeu logique de la raison, construire la vérité toute entière.

Descartes applique ces règles implacables à sa propre pensée. Et il arrive que toute la philosophie qu'on lui a enseignée se dissout devant cet examen; il en vient à douter de tout. Ce n'est pas un doute absoulu mais un doute provisoire, un doute méthodique, c'est-à-dire un doute qui servira à découvrir la vérité. Dans cette analyse qui ébranle toutes ses notions Descartes arrive à un fait irréductible dont il ne peut pas douter quoi qu'il fasse, c'est l'existence de sa pensée; il en conclut immédiatement que puisqu'il pense, il existe: cogito ergo sum. C'est le point de départ de la reconstruction.

DESCARTES ET LA RELIGION
Lorsque Descartes entreprend cette analyse qui ruinera toute la philosophie traditionnelle, il met à part la morale pratique qui est garantie par la coutûme et la religion qui échappe à sa méthode parce qu'elle est fondée sur l'autorité. Il restera toute sa vie un croyant sincère. De son temps beaucoup de bons esprits voyaient même dans sa méthode un moyen nouveau de défendre la religion; et de fait, au XVIIème siècle la rasion s'appuyant sur l'analyse et sur l'évidence travailla à l'apologie de la foi contre les libertins. Mais la raison individuelle que rien ne limite peut servir à détruire aussi bien qu'à construire. Bossuet, vers la fin de sa vie s'en aperçut et le XVIIIème siècle a montré qu'il voyait clair.

DESCARTES ET L'IDEAL CLASSIQUE
L'influence de Descartes fut profonde sur la formation de l'idéal classique. Sa méthode philosophique passa dans la littérature: l'analyse minutieuse, le culte de la clarté et de l'ordre sont à la base de toutes les grandes oeuvres littéraires du XVIIème siècle. Il fournit même à l'école de 1660 des idées plus fondamentales: le vrai et le beau sont identiques; l'art, comme la science, néglige l'individuel et sa tâche à l'universel; la raison et la faculté infaillible qui nous mène à la beauté comme elle nous mène à la vérité. Il est impossible de ne pas être frappé des ressemblances qu'il y a entre dans la doctrine de Descartes et celle de Boileau. Mais Descartes n'a pas créé ce courant, il n'est pas l'ouvrier unique de l'idéal classique. Il est seulement celui qui a le mieux compris les besoins généreux de l'esprit et de son temps, et celui qui leur a donné une expression philosophique. Cette formule cartésienne a ainsi réalisé une synthèse qui est imposée.

DESCARTES ECRIVAIN
Montaigne et Balzac avaient traité en français des questions de moral. Descartes est le premier qui ait écrit en français sur des matières de philosophie proprement dite. Aussi l'importance du Dicours de la Méthode est considérable dans l'histoire de notre littérature: par Descartes la philosophie devient accessible aux gens du monde et cesse d'être un simple exercice d'école.

Descartes n'est pas un artiste. Il dédaigne les artifices de style, il n'a que mépris pour les procédé de rhétorique qui consistent à toucher l'imagination où les sens du lecteur. Il veut parler à l'esprit aussi les qualités maitresses de son style sont l'ordre et la clarté. Mais l'enhainement des idées est si rigoureux qu'ils donnent l'impression d'une vie puissante qui s'affirme, s'avance, et simplifie en s'avançant. La logique devient ainsi éloquente.

DIFFUSION DU CARTESIANISME
Descartes eut de nombreux disciples qui rependirent sa doctrine, parfois en la modifiant. Les principaux sont le Père Mersenne, et le Père Malebranche dont l'ouvrage principal, la Recherche de la Vérité, a une grande valeur de pensée et d'art. Le cartésianisme pénétra à l'Oratoire et à Port-Royal. Il eut surtout une grande fortune dans les salons, nous savons que Mme de Grignan en était entichée et qu'on en discutait chez Mme de la Sablière; Molière nous dit même que "cartésianiser" était devenu une manie ridicule chez les femmes du monde. Sans doute les mondains avaient fait un succès à des théories secondaires qui ne sont pas le cartésianisme mais cet engouement prouve cependant que le XVIIème siècle avait l'impression vague de l'importance de Descartes en réalité, il a mis fin à une période et à un mode de penser en rejetant l'aristotélisme; et, en instaurant l'exercie de la raison individuelle, il a ouvert la voie à toute la pensée moderne. L'opération comportait de grands avantages et de grands périls. En tout cas, elle montre en Descartes un des plus grands génies de notre race.

AUTEURS et LEURS OEUVRES

  • Louis Aragon (20ème siècle)
  • Samuel Beckett - "En Attendant Godot" (20ème siècle - Théâtre)
  • Eugène Ionesco - "La Cantatrice Chauve", "Rhinocéros" (20ème siècle - Théâtre)
  • Aimé Césaire - "Cahier du Retour au Pays Natal" (20ème siècle)
  • Jacques Prévert - "Paroles" (20ème siècle)
  • Marguerite Yourcenar - "Alexis ou Le traité du Vain Combat" (20ème siècle)
  • André Breton - "Nadja" (20ème siècle)
  • Jean Cocteau - "Les Enfants Terribles" (20ème siècle)
  • Jean-Paul Sartre - "Huis Clos", "Les Mouches", "La Nausée", "Le Mur" (20ème siècle)
  • Albert Camus - "L'Etranger", "La Peste" (20ème siècle)
  • Colette - "Les Séries de "Claudine" (20ème siècle)
  • Guillaume Apollinaire - "Calligrammes" (20ème siècle - Poésie)
  • André Gide - "Les Nourritures Terrestres", "La Symphonie Pastorale", "Les Caves du Vatican", "Les Faux Monnayeurs" (20ème siècle)
  • Paul Verlaine - "Romances Sans Paroles" (19ème siècle - Symbolisme)
  • Arthur Rimbaud - "Le Dormeur du Val" (19ème siècle - Symbolisme)
  • Mallarmé - "Poésies" (19ème siècle - Symbolisme)
  • Charles Baudelaire - "Les Fleurs du Mal", "L'Etranger" (19ème siècle - Symbolisme)
  • Emile Zola - "Germinal", "L'Assommoir", "Thérèse Raquin", La Bête humaine" (19ème siècle, Naturalisme)
  • Guy de Maupassant - "Papa de Simon", "L'Auberge", "Aux Champs", "La Ficelle", "Pierrot", "Toine", "La Bête du Maitre Belhomme", "La Parrure", "La Dot", "La Rempailleuse" (19ème siècle - Réalisme)
  • Alexandre Dumas - "Les Trois Mousquetaires", "Le Comte de Monte Cristo", "La Reine Margot" (19ème siècle)
  • George Sand - "La Petite Fadette", "La Mare au Diable" (19ème siècle)
  • Gustave Flaubert - "Madame Bovary", "Salammbô", "L'Education Sentimentale" (19ème siècle - Réalisme)
  • Honoré de Balzac - "Le Père Goriot", "Eugénie Grandet", La Peau de Chagrin", "Le Colonel Chabert", "Le Lys dans La Vallée", "Illusions Perdues", "Le médecin de Campagne", "Les Chouans" (19ème siècle - Romantisme et Réalisme)
  • Stendhal - "Le Rouge et Le Noir", "La Chartreuse de Parme", "Vie de Rossini" (19ème siècle - Romantisme et Réalisme)
  • Victor Hugo - "Notre Dame de Paris", "Les Misérables", "Le Dernier Jour d'Un Condamné", "Les Orientales", "Hernani", "Cromwell", "William Shakespeare" (19ème siècle - Romantisme)
  • Gérard de Nerval - "Odelettes" (19ème siècle - Romantisme, poésie)
  • Alfred de Vigny - "La mort du Loup" (19ème siècle - Romantisme, poésie)
  • Alfred de Musset - "Les Caprices de Marianne" (19ème siècle - Romantisme, théâtre)
  • Alphonse de Lamartine - "Méditations Poétiques" (19ème siècle - Romantisme, poésie)
  • Bernardin de Saint-Pierre - "Paul et Virginie" (19ème siècle - Préromantisme)
  • Madame de Staël - "Colline et Delphine", "De l’Allemagne" (19ème siècle - Préromantisme)
  • Senancour - "Oberman" (19ème siècle - Préromantisme)
  • Benjamin Constant - "Adolphe" (19ème siècle - Préromantisme)
  • François René de Chateaubriand - "Mémoires d'Outre-Tombe", "René" (19ème siècle - Préromantisme)
  • Le Sage - "Gil Blas de Sentillane" (18ème siècle)
  • Marquis de Sade - "Justine ou Les Malheurs de la vertu", "Les 120 jours de Sodome" (18ème siècle)
  • Choderlos de Laclos - "Les Liaisons Dangereuses" (18ème siècle - Roman Epistolaire)
  • Jean-Jacques Rouseau - "Emile ou de L'Education", "Les Confessions", "Julie ou La Nouvelle Héloïse" (18ème siècle)
  • Voltaire - "Candide", "Zadig", "Micromégas" (18ème siècle)
  • Diderot - "Le Neveu de Rameau" (18ème siècle)
  • Beaumarchais - "Le Barbier de Séville", "Le Mariage de Figaro" (18ème siècle - Théâtre)
  • Marivaux - "Le Jeu de L'Amour et du Hasard" (18ème siècle - Théâtre)
  • Montesquieu - "L'Esprit des Lois", "Les Lettres Persanes" (18ème siècle)
  • Jean Racine - "Andromaque", "Bérénice", "Britannicus", "Phèdre", "Iphigénie" (17ème siècle - Tragédie)
  • Pierre de Corneille - "Le Cid" (17ème siècle - Tragédie)
  • Molière - "L'Avare", "Le Bourgeois Gentilhomme", "Les Précieuses Ridicules", "Dom Juan", "Le Malade Imaginaire", "Tartuffe", "L'Ecole des Femmes", "Amphitryon", "Les Fourberies de Scapin", "Les Femmes Savantes" (17ème siècle - Comédie)
  • Madame de la Fayette - "La Princesse de Clèves" (17ème siècle)
  • Jean de La Fontaine - "Les Fables" (17ème siècle)
  • Joachim du Bellay - "Regrets" (16ème siècle)
  • Pierre de Ronsard - "Sonnets pour Hélène", "Sonnets pour Marie", "Sonnets pour Cassandre" (16ème siècle)
  • Michel de Montaigne - "Les Essais" (16ème siècle)
  • Thomas More - "L'Utopie" (16ème siècle)
  • Erasmes de Rottherdam - "L'Eloge de la Folie", "Les Antibarbares" (16ème siècle)
  • François Rabelais - "Gargantua" , "Pantagruel" (16ème siècle)