LES COURANTS RELIGIEUX
AU XVIIème SIECLE
On ne peut comprendre le XVIIème siècle si l'on fait abstraction de la religion. Le grand siècle a vu naitre ou se réformer nombre de couvents et de congrégations. Des écclésiastiques ont joué un rôle politique important. Les réformes qui, avec l'Edit de Nantes, ont acquis une certaine liberté de culte, n'ont pas sur le XVIIème siècle français une grande influence. Ils sont d'abord minoritaires et assez étroitement surveillés. Leur doctrine austère, héritée de Calvin et fondée sur la croyance en la prédestination de l'homme, est battue en brèche par l'élan de la Contre-Réforme catholique. Aussi, alors qu'ils pourraient continuer à propager l'image de la misère de l'homme et de sa faiblesse face à un Dieu tout-puissant, se voient-ils supplantés, sur cette question, par un catholicisme d'inspiration augustinienne et par le jansénisme.
LES JESUITES
La congrégation des Jésuites est fondée en 1540. Leur doctrine religieuse, résolument optimiste se base sur la croyance en Dieu qui accorde à l'homme un salut qu'il est libre d'accepter ou de refuser. Elle s'adapte parfaitement à une conception héroïque de l'homme, faisant appel à la gloire et à la générosité. Elle s'adapte surtout très bien -trop bien, dirait Pascal- aux écarts de la vie mondaine, dès lors qu'on entre dans les subtilités de la casuistique. En bref, ce que les jésuites apportent au XVIIème siècle, c'est une foi plus triomphaliste, dénuée de l'angoisse du salut et d'une image misérable de l'homme. Elle trouve dans l'esthétique baroque des églises et dans l'exubérance des décors, un mode d'expression. Beaucoup plus modérée est l'attitude de François de Sales. Cet ancien élève des jésuites, qui fondera sa propre congrégation, publie en 1609 son "Introduction à la vie dévote" montrant que la perfection chrétienne ne consiste pas en extases spectaculaires, ni en pénitences ou mortifications excessives, mais dans l'amour de Dieu. Il propose ainsi, dès le début du siècle, un idéal de vie chrétienne, fondé sur la modération, et conciliable avec la vie mondaine, qui va devenir le modèle religieux et moral de l'époque classique.
Convertion de Saint-Augustin |
L'Augustinisme tire son nom d'une lecture orientée des écrits de Saint-Augustin. Il prend le contre-pied de la spiritualité aisée des jésuites, et insiste sur la misère de l'homme et sur le tragique de sa condition: l'humanité corrompue par le péché et soumise aux passions, ne peut trouver son salut qu'en Dieu.
LE JANSENISME
Le Jansénisme est lui aussi fondé sur la pensée de Saint-Augustin, telle que la concevait Jansénius, l'évêque d'Ypres. Grâce à l'abbé de Saint-Cyran cette doctrine trouve au couvent de Port-Royal une terre d'éléction. Elle insiste sur la misère de l'homme, affirme sa prédestination et le libre choix divin de lui accorder, ou non, son salut, l'homme étant par lui-même incapable de gagner le Ciel. De vives querelles allaient opposer jésuites et jansénistes, entrainant la condamnation de ces derniers par Rome (1653) puis par le parlement français (1661). Il s'ensuivit dix ans de calme, connus sous le nom de "paix de l'Eglise". Mais bien que plus discrète, l'influence du jansénisme continuait à se faire sentir dans certains millieux mondains. C'est à elle qu'on rattache le pessimisme diffus des "Maximes" de La Rochefoucauld et de Mme de Sablé ou certains accents de la tragédie racinienne... Il y avait en outre, autour du couvent, des laïcs cultivés, connus sous le nom de "Messieurs" de Port-Royal. Ces solitaires avaient élaboré pour leurs écoles une grammaire et un art de penser. Ils y prônaient une littérature austère, méthodique, faite de rigueur. Leur influence, contribua à répandre, après 1660, l'esprit cartésien et à lutter contre la démesure et l'exubérance. Il y a dans le jansénisme un ferment d'évolution vers le classicisme, mais, à la différence des classiques les jansénistes se soucient de Foi et non de morale mondaine. Il y a surtout dans le jansénisme un noyau de résistance au baroque, ce dont témoignent les écrits de Nicole, en particulier son "Discours de la Vraie Beauté", dans lequel il condamne les artifices et les subtilités d'écriture.
PORT-ROYAL
L'Abbaye de Port-Royal, d'abord dans la vallée de Chevreuse ensuite transférée à Paris fut le principal centre de la réforme catholique au XVIIème siècle. Cette communauté féminine avait été réformée dès 1608 par son abbesse, la mère Angélique Arnauld et l'abbé de Saint-Cyran qui en fut le directeur de 1633 à 1638. Saint-Cyran introduit les idées de Jansénius (qui insistait sur la gravité de la faute originelle et sur l'importance de la grâce divine qui peut être ainsi refusée à des justes et accordée à des pécheurs) à la fois chez les religieuses de Port-Royal et chez les "Solitaires" (messieurs du Port-Royal) groupe de chrétiens fervents qui, autour d'Antoine Arnauld, de Nicole et de Lancelot se consacrent à une vie de piété et de travail: philosophie, grammaire, philologie, pédagogie. Ils créent même une institution, les "Petites Ecoles" (Racine y sera élève). L'enseignement de Port-Royal a eu cependant une très grande importance sur le plan des idées pédagogiques et de la formation intellectuelle en général. Nicole, Lancelot (1645-1660) écrivent les éditions bilingues de textes anciens, ces jansénistes sont des purs et des novateurs, en tous domaines.
Port-Royal, prône un retour aux sources du christianisme, en particulier à la pensée de Saint-Augustin, qui insistait sur la toute-puissance de Dieu, en limitant la liberté humaine et en considérant la société humaine comme vouée au mal. Cette thèse ne pouvait, par elle-même qu'affaiblir la souveraineté royale, qui se prétendait "de droit divin" et satisfaire au contraire les classes alors victimes du pouvoir, en particulier la noblesse parlementaire. L'Abbaye du Port-Royal fut détruit par ordre du roi en 1710.