C’est un écrivain solitaire qui brille comme une étoile. Il est ardent janséniste, il a consacré toute sa rigueur, toute son imagination et toute sa foi à defendre l’ordre de Port-Royal.
Il est élevé par son père et ses deux soeurs, il n’est pas allé au collège. Il a appris tout seul la géométrie, à 18 ans il imagine et fait construire une machine à calculer. Il part pour Paris où il fait des expériences sur la pression atmosphérique et rencontre Descartes. Il fréquente les libertins, il s’amuse dans le monde et semble oublier Dieu. A la suite d’un accident, il traverse une crise de mysticisme, influencé par ses soeurs, il se sent illuminé par la foi et se retire à Port-Royal et devient un ardent janséniste. C’est là qu’il écrit “Les Provinciales”. Dans ses dernières années il travaille sur un ouvrage concernant la religion chrétienne que la mort ne lui laisse pas de terminer et dont les fragments reconstitués forment “les Pensées”.
D’après Pascal dans cette nature exceptionnelle se réunissent trois grandes qualités, souvent contradictoires. Il possède au plus haut point la rigueur scientifique; il appelle cette qualité “l’esprit de géométrie”. Cela permet des raisonnements rigoureux.
Il est doué d’une sensibilité enflammée par une grande force d’imagination, il appelle cette qualité “l’esprit de finesse”. Elle permet les relations avec autrui, l’ouverture à l’art, cette sensibilité n’est pas de tendresse mais du jansénisme d’après lui. Sa rigueur scientifique ne le rend pas hostile à la religion et aux mystères de la foi.
LES PROVINCIALES:
C’est un occasion qui fait de Pascal un écrivain. Le chef des jansénistes publie une lettre, les jésuites répondent et c’est la cause d’un polémique et le maitre du couvent demande à Pascal de porter l’affaire devant le public. Celui-ci publie 18 lettres anonymes. Le nom des lettres c’est “Les Provinciales” car elles simulent une correspondance entre un provincial et l’un de ses amis qui l’informe.
On y distingue 3 parties:
1. les questions de la grâce: elles occupent les 4 premières lettres. Elles traitent de la censure dont le chef est l’objet et de différentes interprétations de la grâce entre jésuites et jansénistes. Ce sont des lettres de défense.
2. la morale relachée des jésuites,:Pascal prend l’offensif. Il attaque la base de cette morale relachée qui est le probabilisme: toute opinion soutenue par un docteur serieux est probable, même si un autre docteur seriux dit le contraire et en propose à un autre. Exemple: on n’avait pas l’intention de tuer l’adversaire mais seulement de venger son honneur.
3. questions théologiques
Les idées directrices de “Les Pensées”:
Le but est d’amener les libertins à croire en la religion chrétienne. Il s’agit d’abord de montrer à ces libertins que la religion n’est pas contraire à la raison. Il les ammène à aimer cette religion, il leur montre qu’elle est vraie “vénérable parce qu’elle a bien connu l’homme; aimable parce qu’elle promet le vrai bien”.
Cette démarche de Pascal est originale, il ne commence pas par vouloir prouver l’existence de Dieu car il sait que ce débat est sans limite. Il part de la situation de l’homme. L’homme est un mystère; c’est une créature étrange composée de misère et de grandeur, un être indéfini que l’on a du mal à cerner. Cette créature qu’est l’homme est fragile comme un roseau est incroyablement supérieur à tout ce qui parait plus résistant que lui, parce qu’il peut penser, et sait qu’il est fragile. Le christianisme apporte une solution à ce mysticisme, ce mélange de misère et de grandeur s’explique parce que l’homme a connu la grandeur avant le péché originel et qu’il en a gardé les traces.
Extrait de "Pensées"
"Divertissement.
Quand je m’y suis mis quelquefois, à considérer les diverses agitations des hommes et les périls et les peines où ils s’exposent, dans la cour, dans la guerre, d’où naissent tant de querelles, de passions, d’entreprises hardies et souvent mauvaises, etc., j’ai découvert que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. Un homme qui a assez de bien pour vivre, s’il savait demeurer chez soi avec plaisir, n’en sortirait pas pour aller sur la mer ou au siège d’une place. On n’achètera une charge à l’armée si cher, que parce qu’on trouverait insupportable de ne bouger de la ville ; et on ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que parce qu’on ne peut demeurer chez soi avec plaisir.
Mais quand j’ai pensé de plus près, et qu’après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs, j’ai voulu en découvrir la raison, j’ai trouvé qu’il y en a une bien effective, qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable, que rien ne peut nous consoler, lorsque nous y pensons de près.
Quelque condition qu’on se figure, si l’on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir, la royauté est le plus beau poste du monde, et cependant qu’on s’en imagine, accompagné de toutes les satisfactions qui peuvent le toucher. S’il est sans divertissement, et qu’on le laisse considérer et faire réflexion sur ce qu’il est, cette félicité languissante ne le soutiendra point, il tombera par nécessité dans les vues qui le menacent, des révoltes qui peuvent arriver, et enfin de la mort et des maladies qui sont inévitables ; de sorte que, s’il est sans ce qu’on appelle divertissement, le voilà malheureux et plus malheureux que le moindre de ses sujets, qui joue et se divertit".
Blaise Pascal, Pensées, (éd. Brunschvicg n° 139)