GUILLAUME DE LORRIS & JEAN DE MEUNG
LES DEUX AUTEURS DU ROMAN DE LA ROSE
GUILLAUME DE LORRIS
Guillaume de Lorris est le célèbre trouvère du Moyen-Age dont on ne connait presque rien sur la vie. Il est l’auteur de la première partie du Roman de la Rose qu’il rédigeait alors âgé de 25 ans mais hélas l’œuvre est restée inachevée à cause de la mort prématurée de son auteur. De Lorris avait pu composer 4000 vers avant d’être mort.
Tel que l'a conçu Guillaume de Lorris, le Roman de la Rose est une sorte d'art d'amour influencé par Ovide, mais en général conforme à l'idéal de la société du 13ème siècle. Les personnifications étaient depuis longtemps en usage dans la poésie française, mais Guillaume de Lorris, en adoptant ce système, l'a modifié. Avant lui on avait personnifié telle vertu, tel vice; de Lorris personnifie tel ou tel sentiment plus ou moins passager, Bel-Accueil, Danger, etc. C'est là un procédé un peu grossier peut-être, mais qui frappe le lecteur et permet d'esquisser des études psychologiques; les exagérations des imitateurs ne doivent pas retomber sur Guillaume de Lorris, qui, au témoignage d'un bon juge, nous a laissé "un des plus agréables ouvrages du Moyen âge".
JEAN DE MEUNG
Jean de Meung est un célèbre trouvère du Moyen-Age, né à Meung-sur-Loire –Loiret- vers 1250. Il a vécu à Paris où il a probablement suivi ses études à l’université. il paraît avoir passé la plus grande partie de sa vie dans cette ville, où il habitait en dernier lieu une maison de la rue Saint-Jacques qui fut donnée après sa mort, en 1305, aux frères prêcheurs par maître Adam d'Andeli. Le premier et le plus célèbre de ses ouvrages est la fin du Roman de la Rose ayant laissé interrompu vers 1237, par Guillaume de Lorris, décédé à l’âge de 25 ans environ, qui n'en avait écrit que 4070 vers. Le Roman de la Rose n'aurait probablement pas laissé de traces sans la continuation de Jean de Meung qui compte près de 49 000 vers. C'est vers 1280 que Jean de Meung paraît avoir terminé cet immense poème. En 1282, à la demande de Jean de Brienne, comte d'Eu, il mit en prose française le traité De Re militari de Végèce; un peu plus tard, il traduisit les épîtres d'Héloïse et d'Abélard, la Topographia hibernica de Giraud de Barry et le De Amicitia spirituali de saint Ailred; ces deux dernières traductions ne nous ont été conservées par aucun manuscrit connu. Plus tard encore, à la demande du roi de France Philippe le Bel, il traduisit la Consolatio Philosophiae, de Boèce, en vers et en prose, d'après le modèle du latin. Enfin, sur la fin de sa vie, à une date qui peut être fixée entre 1291 et 1296, il écrivit en quatrains monorimes son Testament, oeuvre intéressante où sont prodigués à la fois les témoignages de piété et les sarcasmes contre les moines. Il est mort au début du 14ème siècle.
Jean de Meung reste célèbre surtout comme principal auteur du Roman de la Rose. En acceptant le cadre imaginé par son devancier, le continuateur de Guillaume de Lorris l'a rempli d'un esprit tout différent. Autant le premier auteur du Roman de la Rose est délicat, autant le second est grossier, et il y a entre eux une antithèse presque aussi violente que celle qui existe entre la poésie lyrique courtoise du temps de Philippe-Auguste et les fabliaux. Guillaume de Lorris est l'humble serviteur des dames et Jean de Meung les accable des plus sanglantes injures; le premier réprouve sévèrement la fausseté dans l'amour, le second traite la loyauté de niaiserie. Comme oeuvre d'art et de morale, la seconde partie du Roman de la Rose est inférieure à la première, mais elle est aussi beaucoup plus personnelle et plus vivante, et l'on y sent un tempérament vigoureux servi par une robuste érudition chez cet homme que l'on se représentait, dans les générations qui l'ont immédiatement suivi, comme "solennel maistre et docteur en sainte théologie, philosophe très profond, sachant tout ce qui à entendement humain est scible". ll y a du Rabelais chez Jean de Meung; on peut même dire, avec Gaston Paris, qu'il fut "le Voltaire du Moyen âge, avec toutes les restrictions que comporte ce compliment".