LE ROMAN DE LA ROSE
Le Roman de la Rose est constitué de deux parties fondamentalement différentes. Dans les 4000 premiers vers écrits par Guillaume de Lorris en 1236, le narrateur nous embarque dans un rêve de voyage durant lequel il tombe amoureux d'une rose, enfermée et protégée dans un jardin clos. Le protagoniste plonge le lecteur dans un océan de conventions courtoises, tandis que des forces sexuelles et séductrices se livrent une âpre bataille dans le cadre de cette vision imaginaire allégorique. Ces forces sont personnifiées par des allégories appelées Bel Accueil, Vénus, Largesse et Pitié d'une part, et leurs contreparties morales évoquées par la modestie virginale et la chasteté d'autre part, dont font partie Danger, Honte, Peur, Jalousie et Malebouche. Le bouton de la Rose, qui ne doit pas être cueilli, est protégé et défendu en tant qu'objet le plus précieux qui soit dans la hiérarchie des vertus féminines car il symbolise la virginité de la femme.
De plus, Guillaume de Lorris décrit les souffrances et les désirs de l'Amant et ses efforts constants mais vains pour conquérir le cœur et le corps de la jeune pucelle représentée par la Rose. Tous les thèmes courtois destinés à enchanter le lecteur médiéval par la magie d'un monde printanier y sont présents. Mais le texte de Lorris s'interrompt assez brusquement sur une scène où Jalousie a enfermé la Rose dans une tour afin de la protéger des avances de l'Amant.
Avec Jean de Meung, le ton passe du courtois au philosophique, reflétant ainsi les intérêts académiques de la fin du treizième siècle. Bien que Meung continue la narration de la quête amoureuse du protagoniste, le lecteur commence maintenant à suivre difficilement le fil de l'histoire tant elle est interrompue par un flot de digressions sous forme de dissertations philosophiques. L'allégorie de l'amour courtois fait place à une bataille entre différentes allégories dont certaines aux noms évocateurs, comme Génius et Nature, furent ajoutées à l'histoire de Lorris par Meun. Au cours de leurs échanges, différents sujets sont traités tels que l'amour, l'amitié, et le caractère arbitraire du destin ainsi que plusieurs questions d'ordre politique. L'intrigue principale n'est rappelée que de temps à autre et le lecteur doit attendre la toute fin du texte pour retourner à la narration où la Rose embrasse son destin final et est déflorée: après avoir attaqué maintes fois la forteresse érigée par Jalousie, l'Amant cueille enfin le bouton de la Rose.
LE SYMBOLISME DE LA ROSE
La Rose rouge, la Rose des philosophes, est l'image de la Pierre philosophale. Elle symbolise l'accession à la Lumière, à la Connaissance. Le chemin qui y mène est long et difficile, mais il n'est pas impossible de le parcourir et parfois, d'approcher du but.
Ce chemin est long, difficile, chargé d'embûches comme la tige de la rose est hérissée d'épines, mais aussi parsemé de joies, comme en trouve l'Amant dans le jardin du dieu Amour, et comme en offre le parfum, unique, de la rose. « Et surtout, ce chemin mène à la Connaissance ».
Cette certitude nous est offerte par la référence à Lucine, dont il a déjà été question. Car Lucine, la Lune, symbolise traditionnellement le Mercure des Philosophes, que le processus alchimique va transformer pour obtenir la Pierre Philosophale.
«c'est donc aussi la Rose,
c'est donc aussi la Lumière,
c'est donc aussi la Connaissance»
Et si tel ou tel décide, un jour, de suivre le chemin des fils de science, des enfants d'Hermès, et qu'après de longs et pénibles efforts, il parvienne au but, et devienne un Adepte, peut-être, Hermès Trismégiste lui dira-t-il, comme il le dit dans la Table d'Emeraude : «Tu auras par ce moyen la gloire de tout le monde; et pour cela toute obscurité s'enfuira de toi»
EXTRAIT
"Largesse était tenue en grande estime et grand honneur. Elle avait les sages et les fous absolument sous son pouvoir, tant elle avait fait par ses beaux dons. S'il s'était trouvé que quelqu'un eût pour elle de la haine, je crois pourtant qu'elle en eût fait son ami par sa façon d'obliger; c'est pour cela que l'amour des riches et des pauvres lui était tout acquis. Un homme de haut rang est bien fou s'il est chiche. Un homme de haut rang ne peut avoir nul vice qui lui nuise autant que l'avarice: un homme avare ne peut conquérir ni seigneurie ni grand pays, car il n'a pas une multitude d'amis dont il puisse faire ce qu'il veut. Qu'il n'ait pas souci de son bien celui qui veut avoir des amis, mais qu'il s'en fasse par de beaux dons ; car, exactement de la même manière que la pierre de l'aimant attire à elle le fer subtilement, de même l'or et l'argent qu'on donne conquièrent le cœur des gens".
Hiç yorum yok:
Yorum Gönder