RENE DESCARTES (1596-1650)
René Descartes naquit à La Haye entre Tours et Poitiers, en 1596. Il fut élevé chez les jésuites de la Flèche et montra de bonne heure un goût très vif pour les mathématiques, dont la méthode le séduisait par sa précision. Après voir achevé son droit, il voyagea. Il renonçait aux livres, comme il nous le dit lui-même avec quelques exagérations, pour étudier dans le grand livre du monde. Il vit la Hollande, l'Allemagne et l'Italie; il fut soldat pendant la guerre de Trente Ans. Il observait les hommes mais il était surtout attentif aux mouvements de sa popre pensée. Seul, l'hiver, dans son poêle le 10 novembre 1619, il eut comme une révélation métaphysique, suivie d'une sorte d'extase. Il découvrait toute une science et une philosophie nouvelles, l'application de l'algèbre à la géométrie et l'application de la méthode des mathématiques à la métaphysique. En 1636, quand son système lui parait sufisamment mûri, il en fait connaitre les grandes lignes dans le Discours de la Méthode. Il mourut en 1650 en Suède, où la reine Christine l'avait attiré.
DESCARTES & LA PHILOSOPHIE
Descartes a fait une véritable révolution en philosophie. D'après lui, tout progrès était impossible dans la spéculation philosophique, si on ne commençait pas par renoncer à la méthode aristotélicienne mise à la mode par la scolastique, pour lui substituer une méthode plus pratique issue des mathématiques.
Cette méthode, il l'a exposée dans le Discours de la Méthode. Les principes essentielles en sont les suivantes: en toute chose ne se rendre qu'à l'évidence; n'accepter pour vrai que ce qui est clair et distinct; décomposer les questions par une analyse minutieuse jusqu'à ce qu'on rencontre les éléments irréductibles dont toutes choses sont faites; à l'aide de ces éléments par le jeu logique de la raison, construire la vérité toute entière.
Descartes applique ces règles implacables à sa propre pensée. Et il arrive que toute la philosophie qu'on lui a enseignée se dissout devant cet examen; il en vient à douter de tout. Ce n'est pas un doute absoulu mais un doute provisoire, un doute méthodique, c'est-à-dire un doute qui servira à découvrir la vérité. Dans cette analyse qui ébranle toutes ses notions Descartes arrive à un fait irréductible dont il ne peut pas douter quoi qu'il fasse, c'est l'existence de sa pensée; il en conclut immédiatement que puisqu'il pense, il existe: cogito ergo sum. C'est le point de départ de la reconstruction.
DESCARTES ET LA RELIGION
Lorsque Descartes entreprend cette analyse qui ruinera toute la philosophie traditionnelle, il met à part la morale pratique qui est garantie par la coutûme et la religion qui échappe à sa méthode parce qu'elle est fondée sur l'autorité. Il restera toute sa vie un croyant sincère. De son temps beaucoup de bons esprits voyaient même dans sa méthode un moyen nouveau de défendre la religion; et de fait, au XVIIème siècle la rasion s'appuyant sur l'analyse et sur l'évidence travailla à l'apologie de la foi contre les libertins. Mais la raison individuelle que rien ne limite peut servir à détruire aussi bien qu'à construire. Bossuet, vers la fin de sa vie s'en aperçut et le XVIIIème siècle a montré qu'il voyait clair.
DESCARTES ET L'IDEAL CLASSIQUE
L'influence de Descartes fut profonde sur la formation de l'idéal classique. Sa méthode philosophique passa dans la littérature: l'analyse minutieuse, le culte de la clarté et de l'ordre sont à la base de toutes les grandes oeuvres littéraires du XVIIème siècle. Il fournit même à l'école de 1660 des idées plus fondamentales: le vrai et le beau sont identiques; l'art, comme la science, néglige l'individuel et sa tâche à l'universel; la raison et la faculté infaillible qui nous mène à la beauté comme elle nous mène à la vérité. Il est impossible de ne pas être frappé des ressemblances qu'il y a entre dans la doctrine de Descartes et celle de Boileau. Mais Descartes n'a pas créé ce courant, il n'est pas l'ouvrier unique de l'idéal classique. Il est seulement celui qui a le mieux compris les besoins généreux de l'esprit et de son temps, et celui qui leur a donné une expression philosophique. Cette formule cartésienne a ainsi réalisé une synthèse qui est imposée.
DESCARTES ECRIVAIN
Montaigne et Balzac avaient traité en français des questions de moral. Descartes est le premier qui ait écrit en français sur des matières de philosophie proprement dite. Aussi l'importance du Dicours de la Méthode est considérable dans l'histoire de notre littérature: par Descartes la philosophie devient accessible aux gens du monde et cesse d'être un simple exercice d'école.
Descartes n'est pas un artiste. Il dédaigne les artifices de style, il n'a que mépris pour les procédé de rhétorique qui consistent à toucher l'imagination où les sens du lecteur. Il veut parler à l'esprit aussi les qualités maitresses de son style sont l'ordre et la clarté. Mais l'enhainement des idées est si rigoureux qu'ils donnent l'impression d'une vie puissante qui s'affirme, s'avance, et simplifie en s'avançant. La logique devient ainsi éloquente.
DIFFUSION DU CARTESIANISME
Descartes eut de nombreux disciples qui rependirent sa doctrine, parfois en la modifiant. Les principaux sont le Père Mersenne, et le Père Malebranche dont l'ouvrage principal, la Recherche de la Vérité, a une grande valeur de pensée et d'art. Le cartésianisme pénétra à l'Oratoire et à Port-Royal. Il eut surtout une grande fortune dans les salons, nous savons que Mme de Grignan en était entichée et qu'on en discutait chez Mme de la Sablière; Molière nous dit même que "cartésianiser" était devenu une manie ridicule chez les femmes du monde. Sans doute les mondains avaient fait un succès à des théories secondaires qui ne sont pas le cartésianisme mais cet engouement prouve cependant que le XVIIème siècle avait l'impression vague de l'importance de Descartes en réalité, il a mis fin à une période et à un mode de penser en rejetant l'aristotélisme; et, en instaurant l'exercie de la raison individuelle, il a ouvert la voie à toute la pensée moderne. L'opération comportait de grands avantages et de grands périls. En tout cas, elle montre en Descartes un des plus grands génies de notre race.
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