LE MYTHE D'OEDIPE
INTERPRETE PAR SIGMUND FREUD
La pièce n'est autre chose qu'une révélation progressive et très adroitement mesurée -comparable à une psychanalyse- du fait qu'Oedipe lui-même est le meurtrier de Laïos, mais aussi le fils de la victime et de Jocaste. Epouvanté par les crimes qu'il a commis sans le vouloir, Oedipe se crève les yeux et quitte sa patrie. L'oracle est accompli.
Oedipe Roi est ce qu'on appelle une tragédie du destin; son effet tragique serait dû au constraste entre la toute-puissante volonté des dieux et les vains efforts de l'homme que le malheur poursuit. (...)
Sa destinée nous émeut parce qu'elle aurait pu être la nôtre, parce qu'à notre naissance l'oracle a prononcé contre nous cette même malédiction. Il se peut que nous ayons tous senti à l'égard de notre mère notre première impulsion sexuelle, à l'égard de notre père notre première haine; nos rêves en témoignent. Oedipe qui tue son père et épouse sa mère, ne fait qu'accomplir un des désirs de notre enfance. Mais, plus heureux que lui, nous avons pu, depuis lors, dans la mesure où nous ne sommes pas devenus névropathes, détacher de notre mère nos désirs sexuels et oublier notre jalousie à l'égard de notre père. Nous nous épouvantons à la vue de celui qui a accompli le souhait de notre enfance, et notre épouvante a toute la force du refoulement qui depuis lors s'est exercé contre ces désirs. Le poète, en dévoilant la faute d'Oedipe, nous oblige à regarder en nous-mêmes et à y reconnaitre ces impulsions qui, bien que réprimées, existent toujours.
Sigmund Freud, L'interprétation des rêves, traduction I. Meyerson, 1926
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