PHEDRE
Dans la préface de Phèdre en 1677, Racine évoque ses sources, et principalement le poète grec Euripide (484-406 av. J.-C.), qui dans sa tragédie Hippolyte (428) avait traité le mythe de Phèdre. Dans cette pièce, le héros est poursuivi par la déesse de l'amour, Aphrodite, qui dès les premiers vers clame sa fureur d'être délaissée par le jeune homme au profit d'Artémis. Dans Phèdre, Vénus s'acharne contre la famille de la reine, dont l'ancêtre, le Soleil, avait révélé les amours coupables de la déesse et de Mars. La fatalité prend ainsi la forme de cette haine implacable attachée à toute la descendance du Soleil. Sénèque, philosophe et poète romain du premier siècle après J.-C., est également l'auteur d'une tragédie consacrée à ce sujet. Le récit de Théramène, dans toute son horreur, doit beaucoup à cette source sur laquelle Racine insiste moins. Les ravages de la passion comme maladie de l'âme, ont été également explorés par les Anciens. Citons encore les Héroïdes d'Ovide, et l'Enéide de Virgile, en particulier les amours de Didon et Enée.
"Fille de Minos et de Pasiphaé", Phèdre appartient à une famille illustre: son père est l'un des juges qui siègent aux Enfers. Dans La Poétique, Aristote indique que les héros de tragédie, contrairement aux personnages de comédie, sont de noble extraction. Les conflits tragiques sont donc à la fois personnels et politiques: la mort de Thésée ou la faute de Phèdre ont des conséquences au plus haut niveau de l'Etat.
Conformément à ce que préconise Racine dans la préface de Britannicus, l'action est simple et se déroule par degrés. Chaque étape de l'action retarde et confirme tout à la fois la mort prochaine de Phèdre.
ACTE I►
La pièce s'ouvre in medias res, par une scène entre le héros, Hippolyte, et son confident Théramène. Ce type de scène, fréquent dans la tragédie classique, permet d'allier les informations nécessaires à l'intelligence de l'action et un certain naturel. L'exposition, qui se prolonge jusqu'à la scène 3, est à la fois discours sur l'action et début de cette action. On apprend qu'Hippolyte s'apprête à quitter Trézène, à la recherche de son père Thésée dont il est sans nouvelles. En réalité, cette quête masque une fuite, puisque le jeune homme avoue être amoureux d'Aricie, soeur des ennemis de Thésée : c'est le premier aveu de l'exposition, vers 56. Phèdre apparaît à la scène 3, languissante et désirant mourir. Elle est accompagnée de sa confidente Oenone, à qui elle finit par révéler son amour coupable et vainement combattu pour Hippolyte, son beau-fils.
A la scène 4, l'annonce de la mort de Thésée constitue un évènement qui noue l'action.
L'acte I noue les fils de l'action et constitue le premier palier : le premier aveu de Phèdre.
ACTE II►
Nouvelle scène héros-confident, cette fois entre Aricie et sa suivante Ismène (scène 1). Aricie lui avoue son amour pour Hippolyte, qui désormais tient son sort entre ses mains. Hippolyte vient ensuite remettre le pouvoir de l'Attique à Aricie, et finit par lui déclarer son amour (scène 2). Celle-ci lui laisse entendre que ses sentiments sont partagés avant de quitter la scène (scène 3).
Phèdre vient à Hippolyte, plaider en faveur de son fils (scène 4). Emportée par sa passion elle avoue au jeune prince l'amour qui la consume. Egarée, elle s'offre à son épée pour expier son crime et lui arrache son arme (scène 5). Hippolyte resté seul, part vérifier la rumeur selon laquelle Thésée serait en vie (scène 6). Deuxième palier dans la descente aux enfers de Phèdre: elle a avoué son amour à Hippolyte. La faute est encore plus grave si Thésée n'est pas mort.
ACTE III►
Phèdre désepérée s'en remet à Oenone qui la convainc de fléchir Hippolyte en lui offrant le pouvoir (scène 1). Restée seule, la reine invoque Vénus, instrument de sa perte (scène 2). Avant d'avoir accompli sa mission, Oenone revient annoncer à sa maîtresse le retour de Thésée. Elle l'exhorte à accuser Hippolyte pour sauver son honneur (scène 3). Thésée paraît. Phèdre s'enfuit avec quelques paroles équivoques (scène 4). A Thésée qui lui demande des explications, Hippolyte répond par son désir de fuir. S'installe alors un malentendu entre le père et le fils (scène 5). Le malentendu est un moteur du tragique. Phèdre s'en remet complètement à Oenone.
ACTE IV►
Oenone accomplit son dessein en accusant Hippolyte d'avoir voulu séduire la reine (scène 1). Ce discours trompeur confirme les soupçons nés aux scènes précédentes. Face à la colère de son père, Hippolyte tente vainement de le détromper en lui avouant son amour pour Aricie. Thésée bannit son fils et le voue à la colère de Neptune à la scène suivante. Phèdre se rend auprès de Thésée pour tenter d'adoucir sa colère, mais elle renonce en apprenant l'amour d'Hippolyte pour Aricie (scène 4). La reine seule laisse éclater sa fureur (scène 5), et chasse violemment Oenone venue la réconforter (scène 6).
ACTE V►
La première scène offre une certaine acalmie. Hippolyte expose à Aricie les raisons qui l'ont poussé à se taire face aux accusations de son père, et lui offre de l'épouser et de fuir avec lui. Tandis que le jeune prince la devance, Aricie a un entretien avec Thésée: elle laisse entendre qu'Hippolyte est victime d'une odieuse calomnie (scène 3). Resté seul, Thésée, en proie au doute, donne l'ordre qu'on fasse venir Oenone (scène 4). On apprend à la scène suivante la mort volontaire d'Oenone et le désespoir grandissant de Phèdre. Ces nouvelles plongent Thésée dans l'angoisse: il désire revoir son fils et revient sur les voeux adressés à Neptune. La scène 6 est la célèbre scène du récit de Théramène, venu confirmer les craintes de Thésée: la malédiction hâtivement prononcée s'est réalisée, prenant la forme d'un monstre surgi des flots pour massacrer Hippolyte. La mort héroïque du jeune homme est rendue plus pathétique encore par le désespoir d'Aricie, venue rejoindre celui qui devait être son époux. Phèdre paraît enfin, et avoue son crime en agonisant. (scène 7).
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