CHARLES D’ORLEANS
Charles d’Orléans, fils de Louis d’Orléans, frère de Charles VI, est né en 1391. A seize ans, il a perdu son père, assassiné par Jean sans Peur; à dix-sept ans il a perdu sa mère, Valentine de Milan, qui est morte de douleur; à dix-huit ans, il a perdu sa femme, Isabelle de France; à vingt-quatre ans il est fait prisonnier à Azincourt et il est resté prisonnier à Londres jusqu’à cinquante ans. Rentré en France, il s’est entouré à Blois d’une cour élégante et il y a mena une vie d’épicurien.
Cet homme qui a tant vu d’horreurs et tant de douleurs est un poète; et dans toute son œuvre, on chercherait vainement un cri, un frémissement qui rappelle son époque et ses malheurs. Il s’est amusé à la poésie qui a consolé sa captivité et orné sa vie au château de Blois. Il a écrit des rondeaux, des ballades, des chansons, triant ses mots et ses couleurs, ajustant ses vers, comme un de ces orfèvres de son temps qui « ouvraient » un coffret précieux. Il a célébré l’amour et le retour du printemps. Il s’est lamenté sur la fuite de la jeunesse; il a traité de vieux sujets et il s’est appliqué à les enluminer à sa manière pour en faire des bibelots de choix.
Art alexandrin, art de décadence assurément mais dans cet art, Charles d’Orléans est passé maitre. Il a une grâce jolie, un peu mièvre et qui reste exquise. C’est le dernier des poètes courtois, et dans ses vers comme dans un tombeau précieux, sculpté avec amour, il a enfermé toute courtoisie.
DEDENS MON LIVRE DE PENSEE
Dedens mon Livre de Pensee,
J'ay trouvé escripvant mon cueur
La vraye histoire de douleur,
De larmes toute enluminee,
En deffassant la tresamee
Ymage de plaisant doulceur,
Dedens mon Livre de Pensee.
Helas ! ou l'a mon cueur trouvee?
Lez grossez gouttez de sueur
Lui saillent, de peinne et labeur
Qu'il y prent, et nuit et journee,
Dedens mon livre de Pensee.
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QUE ME CONSEILLEZ-VOUS, MON COEUR ?
Que me conseillez-vous, mon coeur ?
Irai-je par devers la belle
Lui dire la peine mortelle
Que souffrez pour elle en douleur ?
Pour votre bien et son honneur,
C'est droit que votre conseil céle.
Que me conseillez-vous, mon coeur,
Irai-je par devers la belle ?
Si pleine la sais de douceur
Que trouverai merci en elle,
Tôt en aurez bonne nouvelle.
J'y vais, n'est-ce pour le meilleur ?
Que me conseillez-vous, mon coeur ?
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VOSTRE BOUCHE DIT...
Vostre bouche dit: Baisiez moy,
Ce m'est avis quant la regarde ;
Mais Dangier de trop prés la garde,
Dont mainte doleur je reçoy.
Dont mainte doleur je reçoy.
Laissiez m'avoir, par vostre foy,
Un doulx baisier, sans que plus tarde;
Vostre bouche dit: Baisiez moy,
Ce m'est avis quant la regarde.
Dangier me heit, ne scay pourquoy,
Et tousjours Destourbier me darde;
Je prie a Dieu que mal feu l'arde!
Il fust temps qu'il se tenist coy.
Vostre bouche dit: Baisiez moy.
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