LES MÉTAMORPHOSES
Elles sont inspirées de l’œuvre de Boios (III siècle av.J.-C.) qui s’inspirait lui-même de Sophocle, d’Euripide et d’Homère mais les sources d’Ovide proviennent d’abord d’un Grec, Parthénios de Nicée, ensuite de son ami Aemilius Macer. Mais ce ne fut que des sources, pas des modèles.
Les Métamorphoses sont une sorte de musée imaginaire de la mythologie, plus de 250 légendes y figurent. En tout ce sont plus de 15 livres, dont chacun est plus de 1200 vers.
Ovide a rassemblé les légendes et les faits s’étendant du chaos originel au règne d’Auguste. Ces légendes concernent la plupart du temps des métamorphoses d’hommes en animaux, végétaux, minéraux, astres…
Ainsi l’on trouve des personnages comme Deucalion, Pyrrha, Narcisse, Persée, Jason et Médée, Circé, Dédale et Icare, Enée, Romulus, Numa, César… Ovide nous décrit toujours les transformations de manière lente et précise, il ne fait pas que constater la métamorphose, il nous la fait vivre. Les Métamorphoses obéissent à un ordre chronologique et géographique. Le livre I mérite d’être mentionné car il est étrangement proche de la Genèse biblique.
LIVRE I
ORIGINE DU MONDE
Avant la formation de la mer, de la terre, et du ciel qui les environne, la nature dans l'univers n'offrait qu'un seul aspect; on l'appela chaos, masse grossière, informe, qui n'avait que de la pesanteur, sans action et sans vie, mélange confus d'éléments qui se combattaient entre eux. Aucun soleil ne prêtait encore sa lumière au monde; la lune ne faisait point briller son croissant argenté; la terre n'était pas suspendue, balancée par son poids, au milieu des airs; l'océan, sans rivages, n'embrassait pas les vastes flancs du globe. L'air, la terre, et les eaux étaient confondus : la terre sans solidité, l'onde non fluide, l'air privé de lumière. Les éléments étaient ennemis; aucun d'eux n'avait sa forme actuelle. Dans le même corps le froid combattait le chaud, le sec attaquait l'humide; les corps durs et ceux qui étaient sans résistance, les corps les plus pesants et les corps les plus légers se heurtaient, sans cesse opposés et contraires.
CRÉATION DE L'HOMME
Un être plus noble et plus intelligent, fait pour dominer sur tous les autres, manquait encore à ce grand ouvrage. L'homme naquit : et soit que l'architecte suprême l'eût animé d'un souffle divin, soit que la terre conservât encore, dans son sein, quelques-unes des plus pures parties de l'éther dont elle venait d'être séparée, et que le fils de Japet, détrempant cette semence féconde, en eût formé l'homme à l'image des dieux, arbitres de l'univers; l'homme, distingué des autres animaux dont la tête est inclinée vers la terre, put contempler les astres et fixer ses regards sublimes dans les cieux. Ainsi la matière, auparavant informe et stérile, prit la figure de l'homme, jusqu'alors inconnue à l'univers.
LIVRE IV
VÉNUS ET MARS
La Minéide avait achevé. Après un court intervalle, Leuconoé commence, et ses sœurs silencieuses l'écoutent en travaillant.
L'amour a soumis aussi à sa puissance ce Soleil, qui féconde tout de sa lumière éclatante. Je raconterai les amours du Soleil. Comme le premier il voit tout dans le monde, le premier il avait vu l'adultère de Mars et de Vénus. Il en rougit; et, découvrant au fils de Junon l'opprobre de son lit, il lui montra le théâtre de sa honte. Vulcain consterné s'indigne, laisse échapper le fer que travaille sa main, et soudain il fabrique et lime des chaînes d'airain. Il en forme des rets, tissu léger, délicat, et presque imperceptible. Le lin arrondi sur le fuseau, la toile qu'Arachné ourdit sous de vieux toits, n'égalent point en finesse ce tissu merveilleux. Le dieu de Lemnos en combine avec art les ressorts, qui doivent obéir aux moindres mouvements. Il attache ce piège au lit des deux amants; et dès qu'ils sont réunis, il étend son réseau, les surprend, et les retient dans leurs embrassements.
Alors, ouvrant les portes d'ivoire de son palais, à ce spectacle il appelle tous les dieux. Il leur montre le couple enchaîné, honteux, et confus. On rapporte que les dieux rirent de cette aventure. On dit même que, dans un joyeux délire, quelques immortels osèrent souhaiter la même honte au même prix.
LES ENFERS
Il est un chemin enfoncé, bordé d'ifs funèbres, où règne un vaste silence, une ténébreuse horreur; il conduit aux Enfers. Là, le Styx immobile exhale de noires et d'épaisses vapeurs. C'est là que descendent les ombres des mortels qui ont reçu les honneurs du tombeau; c'est là, dans d'immenses déserts, qu'habitent le Froid et la Pâleur; c'est là qu'errent les mânes nouveaux, incertains de la route qui mène à la cité des ombres, au palais terrible où le noir Pluton a fixé son séjour. Cet empire redoutable a cependant mille avenues spacieuses, et par d'innombrables portes on peut y pénétrer. Semblable à l'Océan, qui reçoit tous les fleuves de la terre, il rassemble toutes les âmes de l'univers. Sans cesse les âmes y arrivent, et ne l'emplissent jamais. On les voit errer dégagées de leurs corps. Les unes fréquentent le barreau, les autres la cour du souverain, les autres suivant leurs premiers emplois, imitent aux Enfers ce qu'elles ont fait sur la terre, tandis que les méchants souffrent dans le Tartare des tourments, châtiments de leurs crimes.
La fille de Saturne (tant la haine et la colère lui font oublier sa dignité !) descend du ciel dans cet affreux séjour; elle arrive : sous ses pieds sacrés le seuil tremble; et, par son triple gosier, Cerbère pousse une triple voix. L'épouse de Jupiter appelle les trois sœurs, fille de la Nuit. Déités cruelles, inexorables, elles étaient assises devant les portes de diamant qui ferment le Tartare, et peignaient de leurs cheveux les horribles couleuvres.
Les Furies ayant reconnu la déesse à travers les ténèbres humides, se lèvent : le lieu qu'elles gardent est celui des tortures. Là, Tityos, couché sur la terre, où son corps occupe un espace de neuf arpents, voit ses entrailles à peine dévorées, renaissant sous le bec de l'avide vautour. C'est là, Tantale, qu'au milieu de l'onde la soif te tourmente, et que le fruit se présente et échappe à ta main. C'est là que Sisyphe incessamment roule ou retient un rocher qui retombe; qu'Ixion se suit et s'évite en tournant sur sa roue; et que les Danaïdes, qui donnèrent la mort à leurs époux, puisent sans relâche des ondes qui s'écoulent toujours.
OVIDE
(Traduction de G.T. Villenave, Paris, 1806)
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